Jorge Luis Borges – Walt Whitman

Walt Whitman est né le 31 mai 1819. L’influence du grand poète lyrique américain sur la poésie en langue espagnole a été très grande, d’abord à travers Rubén Darío, le fondateur du mouvement littéraire moderniste. On la retrouve aussi chez Miguel de Unamuno, Jorge Luis Borges, Federico García Lorca, Luis Cernuda, Miguel Hernández. Walt Whitman a été traduit en espagnol dès 1926 par le poète León Felipe (1884-1968) et publié dans la Revista de Occidente, la revue de José Ortega y Gasset. León Felipe avait découvert Whitman vers 1923-1924 alors qu’il vivait à New York. Canto a mí mismo (la traduction de León Felipe de Song of myself de Walt Whitman) a été publié par Losada à Buenos Aires en 1941.

Monument à León Felipe (Hipólito Pérez Calvo 1936-2009) à Tábara (Province de Zamora, Castilla y León), son village natal. 2000.

Jorge Luis Borges a traduit en 1969 Leaves of Grass de Walt Whitman ( 1855 – Hojas de hierba. Publication : Editorial Lumen, Barcelona, 1972 Feuilles d’herbe). Il a écrit aussi un poème à la mémoire du poète américain : Camden 1892. Le titre fait référence à la ville du New Jersey où est mort Whitman ainsi qu’à l’année de son décès.

Camden, 1892

El olor del café y de los periódicos.
El domingo y su tedio. La mañana
y en la entrevista página esa vana
publicación de versos alegóricos

de un colega feliz. El hombre viejo
está postrado y blanco en su decente
habitación de pobre. Ociosamente
mira su cara en el cansado espejo.

Piensa, ya sin asombro, que esa cara
es él. La distraída mano toca
la turbia barba y la saqueada boca.

No está lejos el fin. Su voz declara:
Casi no soy, pero mis versos ritman
la vida y su esplendor. Yo fui Walt Whitman.

El otro, el mismo. Emecé, 1964.

Camden, 1892

Cette odeur des journaux et du café.
Le dimanche, son ennui. Le matin
Et la page entrevue avec les vains
Poèmes allégoriques publiés

Par ce collègue en vue. Blanchi par l’âge
L’homme est là prostré dans son logement
Décent et pauvre. Avec désoeuvrement,
Sur le miroir, il fixe son visage.

Il pense sans surprise que c’est lui
Ce visage. Sa main distraite touche,
En vrac sa barbe et, dévastée, sa bouche.

Sa fin n’est pas très loin. Et sa voix dit :
Je ne suis presque plus, mais mes vers trament
La vie et sa splendeur. Moi, Walt Whitman.

L’Autre, le Même. Œuvre poétique (1925 1965). Collection Poésie/Gallimard n°185, 1985. (Traduction Nestor Ibarra)

https://www.lesvraisvoyageurs.com/2020/06/01/federico-garcia-lorca-walt-whitman-i/

https://www.lesvraisvoyageurs.com/2020/06/01/federico-garcia-lorca-walt-whitman-ii/

https://www.lesvraisvoyageurs.com/2020/06/01/ruben-dario-walt-whitman/

Collection Poésie/Gallimard n°185, 1985.

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