Juan Rulfo

Autoportrait de Juan Rulfo. Années 40.

Juan Rulfo (Juan Nepomuceno Carlos Pérez Rulfo Vizcaíno) est né à Apulco, district de Sayula ( état de Jalisco), le 16 mai 1917.

Enfant, il a assisté à la très violente Guerre des Cristeros (Cristiada, 1926-1929). Son père fut assassiné en juin 1923 et sa mère est morte peu après, en novembre 1927. Il se retrouve orphelin à 10 ans.

Cet écrivain mexicain est célèbre pour son recueil de nouvelles El Llano en llamas (1953) et son roman Pedro Páramo (1955). Son influence a été essentielle sur les écrivains latino-américains du XX ème siècle.

Jorge Luis Borges a dit : ” Pedro Páramo es una de las mejores novelas de las literaturas de lengua hispánica, y aun de toda la literatura. ” Gabriel García Márquez a raconté ainsi sa découverte de cet auteur : « Álvaro Mutis subió a grandes zancadas los siete pisos de mi casa con un paquete de libros, separó del montón el más pequeño y corto, y me dijo muerto de risa: ¡Lea esa vaina, carajo, para que aprenda! Era Pedro Páramo. Aquella noche no pude dormir mientras no terminé la segunda lectura. Nunca, desde la noche tremenda en que leí la Metamorfosis de Kafka en una lúgubre pensión de estudiantes de Bogotá —casi diez años atrás— había sufrido una conmoción semejante. Al día siguiente leí El llano en llamas, y el asombro permaneció intacto. » (Breves nostalgias sobre Juan Rulfo in Juan Rulfo. Toda la obra. Archivos, CSIC, Madrid, 1992.)

C’était aussi un excellent photographe. Il a également été scénariste et adaptateur pour le cinéma et la télévision. À partir de 1962 il a travaillé à l’Instituto indigenista de Mexico, organisation au service des communautés primitives indiennes dont il a dirigé ensuite le département éditorial.

Il est mort à Mexico le 8 janvier 1986.

Juan Rulfo, Pedro Páramo.

“No lo sé, Juan Preciado. Hacía tantos años que no alzaba la cara, que se me olvidó el cielo. Y aunque lo hubiera hecho, ¿qué habría ganado? El cielo está tan alto, y mis ojos tan sin mirada, que vivía contenta con saber dónde quedaba la tierra. ”

« Je n’en sais rien, Juan Preciado ; je n’ai plus levé la tête depuis tant d’années que j’ai oublié le ciel. D’ailleurs, si je l’avais fait, qu’y aurais-je gagné ? Le ciel était si haut et ma vue si basse que je m’estimais déjà heureuse de savoir où se trouvait la terre. »

Voir sur ce blog:

https://www.lesvraisvoyageurs.com/2019/10/02/juan-rulfo-1917-1986-3/

Juan Rulfo, Clocher devant Zempoaltépetl (Oaxaca) 1955.

Juan Rulfo – Elena Poniatowska

Ciudad de México. Parque Juan Rulfo. Busto de Juan Rulfo.

http://www.revistadelauniversidad.unam.mx/ojs_rum/files/journals/1/articles/17982/public/17982-34189-1-PB.pdf

Dans ce texte d’Elena Poniatowska (El escritor en llamas), publié par la Revista de la Universidad de México, on retrouve cette déclaration de Juan Rulfo faite à la journaliste et romancière mexicaine de nombreuses années auparavant. Elle est significative de la personnalité du grand écrivain mexicain, auteur de deux livres marquants de la littérature hispanoaméricaine El llano en llamas (1953) et Pedro Páramo (1955).

«Yo vivo muy encerrado, siempre muy encerrado. Voy de aquí a mi oficina y párale de contar. Yo me la vivo angustiado. Yo soy un hombre muy solo, solo entre los demás. Con la única que platico es con mi soledad. Vivo en la soledad. Ya sé que todos los hombres están solos, pero yo más. Me sentí más solo que nadie cuando llegué a la ciudad de Méjico y nadie hablaba conmigo, y desde entonces la soledad no me ha abandonado. Mi abuela no hablaba con nadie, esta costumbre de hablar es del Distrito Federal, no del campo. En mi casa no hablamos, nadie habla con nadie, ni yo con Clara, ni ella conmigo, ni mis hijos tampoco, nadie habla, eso no se usa, además yo, ni quiero comunicarme, lo que quiero es explicarme lo que sucede y todos los días dialogo conmigo mismo, mientras cruzo las calles para ir a pie al Instituto Nacional Indigenista, voy dialogando conmigo sólo para desahogarme. No me gusta hablar con nadie.»

Elena Poniatowska. Prix Cervantes 2013.

Juan Rulfo 1917 – 1986

Autoportait de Juan Rulfo. Tepoztlán (Morelos). Mai 1955

Je viens de terminer la lecture de Juan Rulfo. Biografía no autorizada (Ediciones Fórcola, 2017) de Reina Roffé. C’est une biographie bien documentée. On comprend mieux la personnalité de cet auteur mexicain et pourquoi il a cessé quasiment de publier après la publication de Pedro Páramo en 1954. Néanmoins, on peut s’étonner du fait que l’auteure ne fasse preuve d’aucune empathie envers l’écrivain.

Juan Rulfo est né le 16 mai 1917 à Apulco, dans l’état de Jalisco.
Son père Juan Nepomuceno Pérez Rulfo est assassiné en juin 1923. Sa mère meurt fin 1927. Il se retrouve orphelin à 10 ans. Sa grand-mère maternelle s’occupe de lui, de ses frères Severiano et Francisco et de sa sœur Eva. Il épouse Clara Aparicio Reyes le 24 avril 1948. Ils auront une fille et trois fils. Il publiera essentiellement un livre de nouvelles El Llano en llamas en 1953 et Pedro Páramo en 1954. il meurt le 7 janvier 1986 à México.

Il s’agit d’un auteur essentiel pour comprendre l’évolution de la littérature hispano-américaine au XX ème siècle. Álvaro Mutis recommanda la lecture de Pedro Páramo à son ami Gabriel García Márquez qui se trouvait dans une période créatrice difficile: «En eso estaba cuando Álvaro Mutis subió a grandes zancadas los siete pisos de mi casa con un paquete de libros, separó del montón el más pequeño y corto, y me dijo muerto de risa: «¡Lea esa vaina, carajo, para que aprenda!» Era Pedro Páramo.» (Breves nostalgias sobre Juan Rulfo en Juan Rulfo. Toda la obra. Archivos, CSIC, Madrid, 1992.)

Pedro Páramo.

“ Vine a Comala porque me dijeron que acá vivía mi padre, un tal Pedro Páramo. Mi madre me lo dijo. Y yo le prometí que vendría a verlo en cuanto ella muriera. Le apreté sus manos en señal de que lo haría; pues ella estaba por morirse y yo en plan de prometerlo todo. «No dejes de ir a visitarlo -me recomendó-. Se llama de otro modo y de este otro. Estoy segura de que le dará gusto conocerte.» Entonces no pude hacer otra cosa sino decirle que así lo haría, y de tanto decírselo se lo seguí diciendo aun después que a mis manos les costó trabajo zafarse de sus manos muertas.
Todavía antes me había dicho: – No vayas a pedirle nada. Exígele lo nuestro. Lo que estuvo obligado a darme y nunca me dio… El olvido en que nos tuvo, mi hijo, cóbraselo caro. – Así lo haré, madre.
Pero no pensé cumplir mi promesa. Hasta que ahora pronto comencé a llenarme de sueños, a darle vuelo a las ilusiones. Y de este modo se me fue formando un mundo alrededor de la esperanza que era aquel señor llamado Pedro Páramo, el marido de mi madre. Por eso vine a Comala.»

«Je suis venu à Comala parce que j’ai appris que mon père, un certain Pedro Paramo, y vivait. C’est ma mère qui me l’a dit. Et je lui ai promis d’aller le voir quand elle serait morte. J’ai pressé ses mains pour lui assurer que je le ferais; elle se mourait et j’étais prêt à lui promettre n’importe quoi. «Ne manque pas d’aller le trouver, m’a-t-elle recommandé. Il porte tel prénom et tel nom. Je suis sûre qu’il sera content de te connaître.» Dans ces conditions, il a bien fallu lui dire que je n’y manquerais pas, et, à force de le lui répéter, j’y étais encore après avoir, non sans peine, détaché mes mains de ses mains mortes.
Auparavant, elle m’avait encore dit: «Surtout, ne lui réclame rien. N’exige que notre dû. Ce qu’il me devait et ne m’a jamais donné… L’oubli dans lequel il nous a laissés, fais-le-lui payer cher, mon enfant. – Je le ferai, maman.»
Mais je ne comptais pas tenir ma promesse. Du moins jusqu’à ces derniers temps, quand j’ai commencé à me remplir de rêves, à laisser les illusions grandir. C’est ainsi que je me suis bâti tout un monde autour de l’espoir qu’était pour moi ce monsieur appelé Pedro Paramo, le mari de ma mère. Voilà pourquoi je suis venu à Comala.»

Gallimard, Première parution en 1959 Traduction de l’espagnol (Mexique) par Gabriel Iaculli. Nouvelle traduction en 2005.


Présentation de ce roman sur le site des éditions Gallimard:
«On l’a lu d’abord comme un roman «rural» et «paysan», voire comme un exemple de la meilleure littérature «indigéniste». Dans les années soixante et soixante-dix, il est devenu un grand roman «mexicain», puis «latino-américain». Aujourd’hui, on dit que Pedro Páramo est, tout simplement, l’une des plus grandes œuvres du XXe siècle, un classique contemporain que la critique compare souvent au Château de Kafka et au Bruit et la fureur de Faulkner.

Et pour cause : personne ne sort indemne de la lecture de Pedro Páramo. Tout comme Kafka et Faulkner, Rulfo a su mettre en scène une histoire fascinante, sans âge et d’une beauté rare : la quête du père qui mène Juan Preciado à Comala et à la rencontre de son destin, un voyage vertigineux raconté par un chœur de personnages insolites qui nous donnent à entendre la voix profonde du Mexique, au-delà des frontières entre la mémoire et l’oubli, le passé et le présent, les morts et les vivants.»

Dernier détail: Rulfo admirait beaucoup les écrivains nordiques et particulièrement l’islandais Halldór Laxness, Prix Nobel de littérature 1955. Un lien curieux entre mes deux derniers grands voyages: le Mexique et l’Islande.

Juan Rulfo 1917 – 1986

Juan Rulfo. Autoportrait.

Juan Rulfo (Juan Nepomuceno Carlos Pérez Rulfo Vizcaíno) est né à Sayula, une petite localité de l’état de Jalisco au Mexique le 16 mai 1917.

Il passe son enfance dans un orphelinat de Guadalajara car son père et de nombreux membres de sa famille ont été assassinés en 1923 pendant la guerre des Cristeros (1923-1927).

En 1947, il épouse Clara Angelina Aparicio Reyes (née 12 août 1928). Ils auront quatre enfants: Claudia Berenice, Juan Francisco, Juan Pablo et Juan Carlos.

Cet écrivain, scénariste et photographe mexicain, a publié essentiellement un recueil de 17 nouvelles, Le Llano en flammes (1953), qui traite de la vie des paysans de la région de Jalisco dans une nature aride et hostile et un roman, Pedro Páramo (1955), qui traite de la confusion entre le monde des morts et des vivants. Il reflète bien la fascination qu’entretiennent les Mexicains avec la mort (cf. la fête des morts).

C’est un des grands écrivains latino-américains du XX ème siècle. Son œuvre marque un tournant dans la littérature mexicaine. avec lui, c’est la fin du roman révolutionnaire (Martín Luis Guzmán, Francisco L. Urquizo et Mariano Azuela). Pedro Páramo a eu aussi une très grande influence sur les romanciers du boom latino-américain (Gabriel García Márquez, Mario Vargas Llosa)

Juan Rulfo s’éloigne pourtant ensuite de l’écriture et travaille pour la télévision. Il finit sa carrière comme directeur éditorial de l’Instituto Indigenista de México, comparable au Bureau des affaires indiennes.

Il meurt à Mexico le 8 janvier 1986.

  • Le llano en flammes, Gallimard, 2001 ( El llano en llamas, 1953), Traduction: Gabriel Iaculli, 17 nouvelles.
  • Pedro Páramo, Gallimard, 1959 (Pedro Páramo, 1955). Traduction: Roger Lescot, roman. Nouvelle traduction, 2005: Gabriel Iaculli. Gallimard.
  • Le coq d’or, Gallimard, coll. «L’Imaginaire», 2009 ( El gallo de oro, 1980. Réédition 2010), Traduction: Gabriel Iaculli, roman. Écrit entre 1956 et 1958.
Clara Aparicio de Rulfo (Juan Rulfo) vers 1948.

Clara Aparicio, la veuve de Juan Rulfo a fait publier en 2000 81 lettres que son mari lui a envoyées entre 1944 y 1950.

Correspondance de Juan Rulfo. Aire de las colinas: Cartas a Clara (Editorial Sudamericana, 2000, Buenos Aires; Plaza Janés, México; Debate, Espagne)

México, 10 de enero de 1945

Muchachita:

No puedo dejar pasar un día sin pensar en ti. Ayer soñé que tomaba tu carita entre mis manos y te besaba. Fue un dulce y suave sueño. Ayer también me acordé de que aquí habías nacido y bendije esta ciudad por eso, porque te había visto nacer.
No sé lo que está pasando dentro de mí; pero a cada momento siento que hay algo grande y noble por lo que se puede luchar y vivir. Ese algo grande, para mí, lo eres tú. Esto lo he sabido desde hace mucho, más ahora que estoy lejos lo he ratificado y comprendido.
Estuve leyendo hace rato a un tipo que se llama Walt Whitman y encontré una cosa que dice:

El que camina un minuto sin amor,
Camina amortajado hacia su propio funeral.

Y esto me hizo recordar que yo siempre anduve paseando mi amor por todas partes, hasta que te encontré a ti y te lo di enteramente.
Clara, mi madre murió hace 15 años; desde entonces, el único parecido que he encontrado con ella es Clara Aparicio, alguien a quien tú conoces, por lo cual vuelvo a suplicarte le digas me perdone si la quiero como la quiero y lo difícil que es para mí vivir sin ese cariño que ella tiene guardado en su corazón.
Mi madre se llamaba María Vizcaíno y estaba llena de bondad, tanta que su corazón no resintió aquella carga y reventó.
No, no es fácil querer mucho.
Juan

Juan Rulfo 1917-1986

Juan Rulfo.

Juan Rulfo (1917-1986), le célèbre écrivain mexicain (El llano en llamas, 1953, Pedro Páramo, 1955), rencontre Clara Aparicio au café Nápoles de Guadalajara vers 1941, alors qu’elle n’a que treize ans. Leurs rapports furent dans un premier temps uniquement épistolaires. Mais très rapidement, Juan Rulfo lui déclare qu’il veut l’épouser. Ils se marient le 24 avril 1948. Sa veuve a publié les 81 lettres qu’il lui a envoyées entre 1944 y 1950. Aire de las colinas: Cartas a Clara (Editorial Sudamericana, 2000, Buenos Aires; Plaza Janés, México; Debate, Espagne). Juan Rulfo était aussi un extraordinaire photographe.

México, Enero 10 de 1945
Muchachita:
No puedo dejar pasar un día sin pensar en ti. Ayer soñé que tomaba tu carita entre mis manos y te besaba. Fue un dulce y suave sueño. Ayer también me acordé de que aquí habías nacido y bendije esta ciudad por eso, porque te había visto nacer.
No sé lo que está pasando dentro de mí; pero a cada momento siento que hay algo grande y noble por lo que se puede luchar y vivir. Ese algo grande, para mí, lo eres tú. Esto lo he sabido desde hace mucho, más ahora que estoy lejos lo he ratificado y comprendido.
Estuve leyendo hace rato a un tipo que se llama Walt Whitman y encontré una cosa que dice:
El que camina un minuto sin amor,
Camina amortajado hacia su propio funeral.
Y esto me hizo recordar que yo siempre anduve paseando mi amor por todas partes, hasta que te encontré a ti y te lo di enteramente.
Clara, mi madre murió hace 15 años; desde entonces, el único parecido que he encontrado con ella es Clara Aparicio, alguien a quien tú conoces, por lo cual vuelvo a suplicarte le digas me perdone si la quiero como la quiero y lo difícil que es para mí vivir sin ese cariño que ella tiene guardado en su corazón.
Mi madre se llamaba María Vizcaíno y estaba llena de bondad, tanta que su corazón no resintió aquella carga y reventó.
No, no es fácil querer mucho.
Juan

Clara Aparicio (Juan Rulfo) v 1948.