Missak Manouchian

Missak Manouchian au jardin du Luxembourg à Paris.

Le 18 juin 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, a annoncé l’entrée au Panthéon de Missak Manouchian, le 21 février 2024, 80 ans après son exécution. Il sera accompagné de son épouse Mélinée Manouchian. Missak Manouchian est né en 1906 en Arménie. Il rejoint la France en 1925 après le génocide arménien. Écrivain et poète, il adhère au Parti communiste en 1934. En 1943, il devient le chef des FTP-MOI de la région parisienne. Le 16 novembre 1943, à l’issue d’une filature policière de plusieurs mois, il est arrêté alors qu’il avait rendez-vous avec Joseph Epstein. Interrogé et torturé, il est condamné à mort et fusillé avec ses 21 camarades au Mont-Valérien le 21 février 1944. Olga Bancic, seule femme du groupe condamnée à mort avec eux, est, elle, transférée en Allemagne et guillotinée. A travers leur entrée au Panthéon, c’est l’engagement des étrangers en résistance qui est enfin mis en lumière. (Hauts lieux de la mémoire en Île-de-France.)

https://maitron.fr/spip.php?article119876

Hommage à Joseph Epstein, chef des FTPF de l’Île-de-France, fusillé le le 11 avril 1944 au Mont-Valérien et à Celestino Alfonso, communiste, volontaire en Espagne républicaine, résistant FTP-MOI.

https://maitron.fr/spip.php?article24842

https://maitron.fr/spip.php?article9851

Dernière lettre écrite de Missak Manouchian à sa femme Mélinée le 21 février 1944 à la prison de Fresnes, quelques heures avant qu’il soit fusillé au fort du Mont Valérien.

21 février 1944

Ma Chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,

Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas mais pourtant je sais que je ne te verrai plus jamais.

Que puis-je t’écrire ? Tout est confus en moi et bien clair en même temps.

Je m’étais engagé dans l’Armée de la Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il méritera comme châtiment et comme récompense.
Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur à tous… J’ai un regret profond de ne t’avoir pas rendue heureuse, j’aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d’avoir un enfant pour mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu’un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de l’armée française de la libération.

Avec l’aide des amis qui voudront bien m’honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d’être lus. Tu apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l’heure avec le courage et la sérénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n’ai fait de mal à personne et si je l’ai fait, je l’ai fait sans haine.

Aujourd’hui, il y a du soleil. C’est en regardant le soleil et la belle nature que j’ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus. Je t’embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur. Adieu.

Ton ami, ton camarade, ton mari.

Manouchian Michel

P.S. J’ai quinze mille francs dans la valise de la rue de Plaisance. Si tu peux les prendre, rends mes dettes et donne le reste à Armène.

Cette lettre n’a été envoyée à la famille que le 28 novembre 1944.

Louis Aragon, Strophes pour se souvenir, 1955 (chanson de Léo Ferré, 1959). J’ai toujours aimé la version chantée par Marc Ogeret…

.https://www.youtube.com/watch?v=fWPFq5y9iG4

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