Lucie Baud

Lucie Baud (1870-1913)

BAUD Lucie
Née le 23 février 1870 à Saint-Pierre-de-Mésage (Isère), morte le 7 mars 1913 à Tullins (Isère) ; ouvrière tisseuse en soierie ; militante syndicaliste de l’Isère ; auteure d’un récit sur la vie et les luttes de tisseuses de soie dans la région de Vizille.

Le film de Gérard Mordillat sur Lucie BAUD, Mélancolie ouvrière, sera présenté pour la première fois sur Arte vendredi soir 24 août, d’après l’étude de Michelle Perrot.

Fille d’un cultivateur et charron, et d’une ouvrière en soie, Lucie Baud avait commencé à travailler à l’âge de douze ans, en 1883, dans un tissage mécanique du Péage-de-Vizille (Isère), Durand frères – où était employée sa mère – puis à Vizille, au début de 1888. Elle se maria en octobre 1891 avec un homme beaucoup plus âgé qu’elle (vingt ans de plus) qui fut garde champêtre. Un enfant naquit quatre mois plus tard, elle en eut deux autres dans les huit années qui suivirent ; le deuxième mourut à moins d’un an. Elle fut veuve à trente-et-un ans. En 1902, elle entra en contact avec des militants de la Bourse du Travail de Grenoble, créa avec leur aide un « Syndicat des ouvriers et ouvrières en soierie du canton de Vizille » et en devint secrétaire ; l’organisation éveilla un grand écho dans un prolétariat féminin qui, depuis une dizaine d’années, était soumis à un avilissement continu des salaires. Pendant toute l’année 1904, Lucie Baud organisa l’action pour s’opposer à de nouvelles baisses des prix de façon provoquées par l’introduction de mécaniques plus perfectionnées. En août, elle fut déléguée au sixième congrès national de l’industrie textile, à Reims (Marne) : sa participation y fut toute passive dans des assises qui n’abordèrent d’ailleurs pas la question du travail féminin, malgré sa présence au bureau des première et deuxième séances.
Au début de 1905, à la suite de l’annonce d’une diminution de 30 % à l’usine Duplan, Lucie Baud fit adopter le principe d’une grève et, après l’échec des négociations, le travail fut suspendu le 6 mars : deux cents ouvrières luttèrent pendant près de quatre mois, et ne reprirent le chemin des ateliers que le 30 juin, sur une solution de compromis. Lucie Baud avait conduit le combat, organisé des soupes communistes et des collectes dans les usines et pris des contacts pour susciter la solidarité. Le 1er mai notamment, elle avait été un des orateurs du meeting à Grenoble, avec Eugène David et Louis Ferrier, aux côtés d’Alexandre Luquet, délégué de la CGT, pour expliquer le sens de la lutte. Elle avait été à la tête de tous les cortèges, très imposants et, en avril, houleux et marqués par de violents incidents. Elle fut la première victime de la répression patronale, et renvoyée en même temps que cent cinquante de ses compagnes.
Avec la plupart d’entre elles, Lucie Baud partit pour Voiron (Isère) et y arriva en pleine agitation revendicative. Elle participa à la grève générale du printemps 1906, qui s’acheva sur un succès durable et amena une amélioration des conditions du travail féminin dans toute la région soyeuse du Dauphiné.
En septembre 1906, elle tenta de mettre fin à ses jours en se tirant trois coups de revolver dans la tête. Malgré la gravité de ses blessures, ses jours ne furent pas en danger. Dans des lettres, elle expliqua ce geste par des soucis de famille, mais on ne peut pas s’empêcher de le rapprocher de la dépression qui suivit les grands moments d’intensité des grèves.
Le syndicat qu’elle avait créé à Vizille survécut à son départ et, jusqu’en 1914, s’opposa victorieusement à l’action patronale. En juin 1908, Lucie Baud raconta sa vie et ses combats dans un article du Mouvement socialiste, de Hubert Lagardelle, qui est un tableau précieux de la condition ouvrière féminine dans l’Isère au début du XXe siècle.
ŒUVRE : « Les tisseuses de soie dans la région de Vizille », Le Mouvement socialiste, 15 juin 1908, repris dans Le Mouvement social, octobre-décembre 1978, et dans le livre de Michelle Perrot, Mélancolie ouvrière, op. cit.

SOURCES et BIBLIOGRAPHIE : Arch. Dép. Isère, 52 M 76 et 166 M 9. — Madeleine Guilbert, Les Femmes et l’organisation syndicale avant 1914, Paris, 1966, p. 119, 306, 390 et 463. — Michelle Perrot, Mélancolie ouvrière ; Grasset, 2012.

ICONOGRAPHIE : Photo dans IHS CGT Rhône-Alpes, Cahiers d’histoire sociale, n° 79, 2007, p. 4.

(Yves Lequin. Dictionnaire biographique du Mouvement ouvrier. Le Maitron.)

https://www.arte.tv/fr/videos/073425-000-A/melancolie-ouvriere/

Jorge Luis Borges

Jorge Luis Borges jeune.

Jorge Luis Borges est né le 24 août 1899 à Buenos Aires. Il est mort le 14 juin 1986 à Genève. Il considérait Límites comme son meilleur poème.

“En mi opinión, pero no hay razón alguna para que la opinión del poeta valga más que la de los lectores, este poema es el mejor, o mejor dicho el menos malo de los míos.”

LÍMITES 

De estas calles que ahondan el poniente,
una habrá (no sé cuál) que he recorrido
ya por última vez, indiferente
y sin adivinarlo, sometido

a quién prefiera omnipotentes normas
y una secreta y rígida medida
a las sombras, los sueños y las formas
que destejen y tejen esta vida.

Si para todo hay término y hay tasa
y última vez y nunca más y olvido
¿quién nos dirá de quién, en esta casa,
sin saberlo, nos hemos despedido?

Tras el cristal ya gris la noche cesa
y del alto de libros que una trunca
sombra dilatada por la vaga mesa,
alguno habrá que no leeremos nunca.

Hay en el sur más de un portón gastado
con sus jarrones de mampostería
y tunas, que a mi paso está vedado
como si fuera una litografía.

Para siempre cerraste alguna puerta
y hay un espejo que se aguarda en vano;
la encrucijada te parece abierta
y la vigila, cuadrifronte, Jano.

Hay, entre todas tus memorias, una
que se ha perdido irreparablemente;
no te verán bajar a aquella fuente
ni el blanco sol ni la amarilla luna.

No volverá tu voz a lo que el persa
dijo en su lengua de aves y de rosas,
cuando el ocaso, ante la luz dispersa,
quieras decir inolvidables cosas.

¿Y el incesante Ródano y el lago,
todo ese ayer sobre el cual hoy me inclino?
Tan perdido estará como Cartago
que con fuego y con sal borró el latino.

Creo en el alba oír un atareado
rumor de multitudes que se alejan;
son los que me han querido y olvidado;
espacio y tiempo y Borges ya me dejan.

1964.

Jorge Luis Borges décoré de la Légion d’honneur par François Mitterrand à l’Élysée, le 19 janvier 1983.

Fernando Aramburu

Fernando Aramburu.

Après le succès de son roman Patria (750 000 exemplaires vendus, 29 éditions, traduit en plus de 10 langues, une série télévisée préparée par HBO España), Fernando Aramburu (Saint-Sébastien 1959), écrivain basque qui vit à Hanovre en Allemagne depuis plus de 30 ans,  a publié cette année un texte plus intime,  Autorretrato sin mí.  Aramburu, jeune, était poète. Il s’est écarté de la poésie, mais s’en rapproche par ce livre, composé de brefs et véritables poèmes en prose. C’est un livre sur la beauté, et particulièrement celle du castillan. Ce n’est pas un livre d’autofiction, mais c’est un livre de mémoires très humain, écrit avec ironie et pudeur. il rappelle l’enfant dans son quartier, la famille, la lecture, la découverte de la littérature,  les expériences, la femme, l’amour physique, le plaisir, la paternité, la solitude. Cet autoportrait sans moi est le portrait de chacun d’entre nous.

Le passage suivant se trouve pages 125 et 126.

La vida

Yo quisiera decir sencillamente esta mañana que me gusta la vida. Ni triste ni alegre, con un vaso vacío en la mano, tan sólo eso, aunque nadie me oiga, que estoy aquí tranquilo poniendo en orden las conchas que me salen del costado.

Digo, lo he dicho ya, lo diré mañana si amanece, con toda mi potente debilidad, que sí, que juzgo un hecho venturoso que haya nubes y libros y caras sonrientes, y que ahora mismo, desde el horno, se difunda por la casa el olor honrado del pan.

Me gusta la vida, qué se le va a hacer, desde la primera vez que la vi, cuando era chiquita, cuando ni puesta en pie me llegaba a la rodilla. Aquella vida gimiente y descalza que aún no conocía el óxido de los días acumulados. Aquella vida que todavía, de vez en cuando, levanta su pequeño sol en el recuerdo.

Y más tarde no digamos, joven y hermosa, pródiga en noches apasionadas, con aquella gracia incomparable que tenía al desvertirse en la luz modesta del cuarto de estudiante y cuando derramaba sus cabellos olorosos sobre mí antes de darse cálida y entera.

A veces mancha y duele la vida, y uno se retira en silencio a un rincón de su desgracia a esperar que la vida amaine y se enciendan de nuevo las horas azules del gozo. Y aún así, mira por dónde, me gusta la vida. Porque me tiene que gustar. Porque es lo único que hay y yo, a fuerza de vivir y compartir el aire con la gente, no sé qué otra cosa podría hacer sino sacarle gusto a la vida, a esta vida tantas veces malvada que te da un palazo por las buenas y se va.

Tusquets editores, 2018.

León Felipe

León Felipe

COMO TÚ… ( León Felipe 1884-1968 )

Así es mi vida,
piedra,
como tú. Como tú,
piedra pequeña;
como tú,
piedra ligera;
como tú,
canto que ruedas
por las calzadas
y por las veredas;
como tú,
guijarro humilde de las carreteras;
como tú,
que en días de tormenta
te hundes
en el cieno de la tierra
y luego
centelleas
bajo los cascos
y bajo las ruedas;
como tú, que no has servido
para ser ni piedra
de una lonja,
ni piedra de una audiencia,
ni piedra de un palacio,
ni piedra de una iglesia…
como tú,
piedra aventurera…
como tú,
que tal vez estás hecha
sólo para una honda…
piedra pequeña
y
ligera…

Versos y oraciones del caminante, Madrid, 1920.

Comme toi 

Ainsi est ma vie,
pierre,
comme toi. Comme toi,
petite pierre;
comme toi
pierre légère;
comme toi,
galet qui roule
sur les chemins
et les trottoirs;
comme toi,
humble caillou des routes;
comme toi
qui par les jours d’orage
t’aplatis
dans la boue de la terre
et puis
scintilles
sous les sabots
et sous les roues;
comme toi, qui n’as même pas servi
à être pierre
d’une halle de marché,
ni pierre d’un tribunal,
ni pierre d’un palais,
ni pierre d’une église;
comme toi,
pierre aventureuse;
comme toi
qui, peut-être, n’es faite
que pour une fronde,
pierre petite
et
légère…

Le poète espagnol León Felipe s’appelait en réalité Felipe Camino Galicia de la Rosa. Il est né à Tábara (Zamora) le 11 de abril de 1884 et est mort à Ciudad de México, le 18 de septiembre de 1968. Son père était notaire et l’obligea à faire des études de pharmacie. Sa vie fut aventureuse. Il s’occupa de plusieurs pharmacies dans différentes petites villes d’Espagne et fut aussi acteur d’une petite troupe de théâtre. Il passa même trois ans en prison, accusé d’escroquerie. Il partit une première fois d’Espagne pour vivre en Guinée Equatoriale, au Mexique et aux Etats-Unis et ne revint en Espagne que peu avant le début de la Guerre Civile. Militant de la cause républicaine, il partit définitivement au Mexique en 1938 comme conseiller culturel du Gouvernement de la République. On associe généralement sa poésie à celle de Walt Whitman, dont il fut le traducteur.

J’ai lu les poèmes de León Felipe dès 1969, lors de mon premier voyage à Madrid. Ses livres étaient alors interdits dans l’Espagne franquiste, mais on pouvait trouver l’Antología rota, publiée par Losada en Argentine en 1957, dans le quartier étudiant de Argüelles.

Plus tard, bien sûr, j’ai souvent écouté la version de ce poème mis en musique par Paco Ibáñez.

Il y a quelques jours, je suis tombé sur cette version du groupe Evoéh, tiré d’un disque de 2015 El poeta del viento: Homenaje a León Felipe.

https://www.youtube.com/watch?v=H2o9h1Wv46o

Zamora. Parque León Felipe. Homenaje en el centenario de su nacimiento (1984). Escultura de Baltasar Lobo.

C215 (Christian Guémy) – Guillaume Apollinaire

Guillaume Apollinaire. Paris V, 

Dans le parcours Illustres! C215 autour du Panthéon, on peut retrouver Guillaume Apollinaire 11 rue Champollion sur une porte du cinéma La Filmothèque du Quartier Latin et lire un de ses Poèmes à Lou.

Quatre jours mon amour (Guillaume Apollinaire).

C215 (Christian Guémy)

Mon voyage à Valparaíso au Chili en janvier 2018 m’a donné le goût du Street Art et depuis j’y suis plus attentif lors de mes promenades dans Paris.

Du 10 juillet au 8 octobre 2018, on peut suivre le parcours “Illustres ! C215 autour du Panthéon”

Dans la crypte du Panthéon, il est possible d’ observer de près les outils de travail et le processus de création de l’artiste urbain C215 (Christian Guéry né en 1973, actif depuis 2005) pour réaliser ses pochoirs. Ceux-ci sont réalisés à la main à partir des impressions photographiques, sans croquis préparatoire. Ils sont découpés au scalpel, scannés, agrandis puis archivés. Des livres, des lettres manuscrites, et des objets professionnels de Marie Curie, Germaine Tillion, André Malraux, Victor Hugo ou Antoine de Saint-Exupéry sont aussi exposés. Dans une interview filmée, l’artiste aborde son rapport au Panthéon, aux gloires de la nation, à la pratique des graffitis et aux messages que ces derniers véhiculent.

Ensuite, dans les rues du Ve arrondissement, on peut découvrir les portraits de 28 personnalités inhumées ou honorées au Panthéon. L’artiste C215 réussit à marquer la présence de personnages illustres dans la ville d’aujourd’hui avec des pochoirs très colorés. Les portraits graffés de 28 personnalités se retrouvent sur le mobilier urbain des rues du V arrondissement. Au détour d’une ruelle, sur une façade en briques ou sur le côté d’une boîte aux lettres, resurgissent ces illustres fantômes du passé.

«Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est de rester dans le street art, dans la spontanéité des œuvres de la rue à taille humaine, qui sont périssables. Ce sont des choses qui surgissent tout à coup, qui n’étaient pas là hier. Il faut vite les prendre en photo avant leur disparition»

«Un graff fait la veille c’est du vandalisme, un graff fait il y a 2 000 ans c’est de l’Histoire.» pense Christian Guémy.

Le troisième volet ramène au Panthéon. Sur le trajet qui mène dans les hauteurs du monument, on peut voir des inscriptions mystérieuses. Le Panthéon abrite plusieurs milliers de graffitis. C’est l’occasion d’admirer la vue exceptionnelle à 360° et les messages qui s’inscrivent, plus ou moins lisibles. Inscriptions humoristiques, personnelles, érotiques ou politiques, elles racontent un morceau d’histoire du bâtiment, de sa construction à la Deuxième Guerre Mondiale.

Victor Hugo. Paris V, Rue Soufflot n°7. Boite à feux..JPG

Gabriel García Márquez

Gabriel García Márquez (Santi Burgos). Madrid, Mayo de 1996.

El País, 11 de mayo de 2018

Viendo llover en Galicia (Gabriel García Márquez)

Mi muy viejo amigo, el pintor poeta y novelista Héctor Rojas Herazo -a quien no veía desde hacía mucho tiempo- debió sufrir un estremecimiento de compasión cuando me vio en Madrid abrumado por un tumulto de fotógrafos, periodistas y solicitantes de autógrafos, y se acercó para decirme en voz baja: “Recuerda que de vez en cuando debes ser amable contigo mismo”. En efecto, fiel a mi determinación de complacer todas las demandas sin tomar en cuenta mi propia fatiga, hacía ya varios meses -quizá varios años- en que no me ofrecía a mí mismo un regalo merecido. De modo que decidí regalarme en la realidad uno de mis sueños más antiguos: conocer Galicia.Alguien a quien le gusta comer no puede pensar en Galicia sin pensar antes que en cualquier otra cosa en los placeres de su cocina. “La nostalgia empieza por la comida”, dijo el che Guevara, tal vez añorando los asados astronómicos de su tierra argentina, mientras se hablaba de asuntos de guerra en las noches de hombres solos en la sierra Maestra. También para mí la nostalgia de Galicia había empezado por la comida, antes de que hubiera conocido la tierra. El caso es que mi abuela, en la casa grande de Aracataca, donde conocí mis primeros fantasmas, tenía el exquisito oficio de panadera, y lo practicaba aun cuando ya estaba vieja y a punto de quedarse ciega, hasta que una crecida del río le desbarató el horno y nadie en la casa tuvo ánimos para reconstruirlo. Pero la vocación de la abuela era tan definida, que cuando no pudo hacer panes siguió haciendo jamones. Unos jamones deliciosos, que, sin embargo, no nos gustaban a los niños -porque a los niños no les gustan las novedades de los adultos-, pero el sabor de la primera prueba se me quedó grabado para siempre en la memoria del paladar. No volví a encontrarlo jamás en ninguno de los muchos y diversos jamones que comí después en mis años buenos y en mis años malos, hasta que probé por casualidad -40 años después, en Barcelona- una rebanada inocente de lacón. Todo el alborozo, todas las incertidumbres y toda la soledad de la infancia me volvieron de pronto en ese sabor, que era el inconfundible de los lacones de la abuela. De aquella experiencia surgió mi interés de descifrar su ascendencia, y buscando la suya encontré la mía en los verdes frenéticos de mayo hasta el mar y las lluvias feraces y los vientos eternos de los campos de Galicia. Sólo entonces entendí de dónde había sacado la abuela aquella credulidad que le permitía vivir en un mundo sobrenatural donde todo era posible, donde las explicaciones racionales carecían por completo de validez, y entendí de dónde le venía la pasión de cocinar para alimentar a los forasteros y su costumbre de cantar todo el día. “Hay que hacer carne y pescado porque no se sabe qué le gusta a los que vengan a almorzar”, solía decir cuando oía el silbato del tren. Murió muy vieja, ciega, y con el sentido de la realidad trastornado por completo, hasta el punto de que hablaba de sus recuerdos más antiguos como si estuvieran ocurriendo en el instante, y conversaba con los muertos que había conocido vivos en su juventud remota. Le contaba estas cosas a un amigo gallego la semana pasada, en Santiago de Compostela, y él me dijo: “Entonces tu abuela era gallega, sin ninguna duda, porque estaba loca”. En realidad, todos los gallegos que conozco, y los que vi ahora sin tiempo para conocerlos, me parecen nacidos bajo el signo de Piscis.

No sé de dónde viene la vergüenza de ser turista. A muchos amigos, en pleno frenesí turístico, les he oído decir que no quieren mezclarse con los turistas, sin darse cuenta de que, aunque no se mezclen, ellos son tan turistas como los otros. Yo, cuando voy a conocer algún lugar sin disponer de mucho tiempo para ir más a fondo, asumo sin pudor mi condición de turista. Me gusta inscribirme en esas excursiones rápidas, en las que los guías explican todo lo que se ve por las ventanas del autobús, a la derecha y a la izquierda, señores y señoras, entre otras cosas porque así sé de una vez todo lo que no hay que ver después, cuando salgo solo a conocer el lugar por mis propios medios. Sin embargo, Santiago de Compostela no da tiempo para tantos pormenores: la ciudad se impone de inmediato, completa y para siempre, como si se hubiera nacido en ella. Siempre he creído, y lo sigo creyendo, que no hay en el mundo una plaza más bella que la de Siena. La única que me ha hecho dudar es la de Santiago de Compostela, por su equilibrio y su aire juvenil, que no permite pensar en su edad venerable, sino que parece construida el día anterior por alguien que hubiera perdido el sentido del tiempo. Tal vez esta impresión no tenga su origen en la plaza misma, sino en el hecho de estar -como toda la ciudad, hasta en sus últimos rincones- incorporada hasta el alma a la vida cotidiana de hoy. Es una ciudad viva, tomada por una muchedumbre de estudiantes alegres y bulliciosos, que no le dan ni una sola tregua para envejecer. En los muros intactos, la vegetación se abre paso por entre las grietas, en una lucha implacable por sobrevivir al olvido, y uno se encuentra a cada paso, como la cosa más natural del mundo, con el milagro de las piedras florecidas.

Llovió durante tres días, pero no de un modo inclemente, sino con intempestivos espacios de un sol radiante. Sin embargo, los amigos gallegos no parecían ver esas pausas doradas, sino que a cada instante nos daban excusas por la lluvia. Tal vez ni siquiera ellos eran conscientes de que Galicía sin lluvia hubiera sido una desilusión, porque el suyo es un país mítico -mucho más de lo que los propios gallegos se lo imaginan-, y en los países míticos nunca sale el sol. “Si hubieran venido la semana pasada, habrían encontrado un tiempo estupendo”, nos decían, avergonzados. “Este tiempo no corresponde a la estación”, insistían, sin acordarse de Valle-Inclán, de Rosalía de Castro, de los poetas gallegos de siempre, en cuyos libros llueve desde el principio de la creación y sopla un viento interminable, que es tal vez el que siembra ese germen lunático que hace distintos y amorosos a tantos gallegos.

Llovía en la ciudad, llovía en los campos intensos, llovía en el paraíso lacustre de la ría de Arosa y en la ría de Vigo, y en su puente, llovía en la plaza, impávida y casi irreal, de Cambados, y hasta en la isla de la Toja, donde hay un hotel de otro mundo y otro tiempo, que parece esperar a que escampe, a que cese el viento y resplandezca el sol para empezar a vivir. Andábamos por entre esta lluvia como por un estado de gracia, comiendo a puñados los únicos mariscos vivos que quedan en este mundo devastado, comiendo unos pescados que siguen siendo peces en el plato y unas ensaladas que seguían creciendo en la mesa, y sabíamos que todo aquello estaba allí por virtud de la lluvia, que nunca acaba de caer. Hace ahora muchos años, en un restaurante de Barcelona, le oí hablar de la comida de Galicia al escritor Álvaro Cunqueiro, y sus descripciones eran tan deslumbrantes que me parecieron delirios de gallego. Desde que tengo memoria les he oído hablar de Galicia a los gallegos de América, y siempre pensé que sus recuerdos estaban deformados por los espejismos de la nostalgia. Hoy me acuerdo de mis 72 horas en Galicia y me pregunto si todo aquello era verdad, o si es que yo mismo he empezado a ser víctima de los mismos desvaríos de mi abuela. Entre gallegos -ya lo sabemos- nunca se sabe.

La huella gallega del realismo mágico de García Márquez (Aníbal Malvar), Público, 11/08/2018. 

https://www.publico.es/culturas/huella-gallega-realismo-magico-garcia-marquez.html

Santiago de Compostela, Catedral. Plaza do Obradoiro.

Charles Baudelaire

Spleen LXXVIII

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l’Espérance, comme une chauve-souris,
S’en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D’une vaste prison imite les barreaux,
Et qu’un peuple muet d’infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

–Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l’Espoir,
Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857

Charles Baudelaire, Autoportrait 1860.

L’Apporteur de l’Espoir

Paris XIII Gare d’Austerlitz. Cour des départs. L’Apporteur de l’Espoir (Denis Monfleur) 2016.

Paris XIII Gare d’Austerlitz. Cour des départs, Côté Seine.

Cette statue, sculptée dans un bloc monolithique de lave de Chambois , se trouve à l’entrée de la Gare d’Austerlitz. Elle rend hommage aux ” Brigades Internationales ” qui se sont retrouvées dans cette Gare le 22 octobre 1936 , pour aller combattre en Espagne le fascisme et défendre la République espagnole. Des volontaires venus de tous les pays se sont rassemblés là pour prendre le train. Cette sculpture a été réalisée par le sculpteur Denis Monfleur, né en 1962. Son titre ” L’Apporteur de l’Espoir ” fait référence au roman d’André Malraux ” L’Espoir “, publié en décembre 1937 chez Gallimard. C’est la plus grande statue monolithique posée à Paris depuis un siècle. Elle pèse 6 tonnes et fait 3 mètres de haut. Elle a été inaugurée le 22 octobre 2016 pour le 80 ème anniversaire de cet événement.

Sur le plan esthétique, elle donne l’impression de n’être qu’une ébauche , avec des éléments taillés ” à la serpe “.

Paris XIII, Gare d’Austerlitz. Cour des départs. L’Apporteur de l’Espoir (Denis Monfleur) 2016.