Dans le journal El País, on peut lire un très bel article de l’écrivain et journaliste Manuel Vicent après la mort soudaine de son fils Mauricio le 11 juin 2023. Ce dernier avait 59 ans et fut le correspondant de El País et de la radio Ser à La Havane de 1991 à 2011.
El País, 18/06/2023
Mientras viva (Manuel Vicent)
Llegó la muerte sigilosamente de madrugada y con una certera puñalada se llevó al ser que más queríamos. Qué artera ha sido la muerte, que en vez de dármela a mí eligió solo herirme en ese punto que más me podía doler. Nunca hay suficientes lágrimas a la hora de enterrar a un hijo. Ningún dolor puede ser tan profundo. Sé muy bien que con el tiempo todo se desvanece, pero, mientras viva, ni el tiempo ni la muerte podrán arrebatarme nunca el amor que sentía por mi hijo y el que él me regalaba con su furiosa alegría de vivir. La gloria es la única inmortalidad que está en poder de los humanos. “No consientas ―dice Isócrates― que toda tu naturaleza sea destruida a la vez; por el contrario, ya que te tocó en suerte un cuerpo mortal, intenta dejar el recuerdo inmortal de tu espíritu”. Cuando empezó a ejercer de corresponsal en La Habana, mi hijo me pidió algunos consejos. Le dije: ”Mauri, no uses adjetivos en los que podrías verte involucrado y desprotegido. El verbo es la acción con que se definen los hechos. Así lo han usado siempre los grandes periodistas. El prestigio de un corresponsal consiste en estar bien informado. Sé leal, solidario y generoso con los compañeros. Por lo demás, hazme el favor de no vivir tan deprisa”. Eso es lo que pasó, que el fuego de su vida encontró demasiado pronto sus cenizas. Vuela ahora mi pensamiento hacia los días felices del pasado, a los veranos compartidos con los amigos en que salíamos juntos a navegar. Esta vez la quilla partirá en dos su memoria y las olas batirán con ella los costados del barco. Llegará el otoño y su silueta se confundirá con una de las hojas doradas arrastrada por el viento y luego se irán alejando su voz y sus risas hasta perderse en la niebla de un extraño aeropuerto donde se embarcan solo las almas y allí ante la última aduana le diré: buen viaje, Mauri. Llámame en cuanto llegues a La Habana.
Glenda Jackson (Bernarda), Joan Plowright (La Poncia) dans La maison de Bernarda Alba.
Glenda Jackson est née le 9 mai 1936 à Birkenhead, dans le nord-ouest de l’Angleterre. Fille d’un maçon et d’une femme de ménage, elle quitte l’école à 16 ans et travaille comme préparatrice en pharmacie. Elle intègre une troupe de théâtre amateur. Malgré le manque de soutien familial, elle est reçue à la prestigieuse Académie royale d’art dramatique de Londres. Elle connaît le succès en 1964 dans Hamlet de William Shakespeare, puis dans Marat-Sade, la pièce de Peter Weiss, mise en scène par Peter Brook. Au cinéma, elle a reçu deux Oscars : en 1971 pour Love de Ken Russell (Women in Love, d’après le roman de D.H.Lawrence Femmes amoureuses) et en 1974 pour Une maîtressedans les bras, une femme sur le dos de Melvin Frank (A touch of Class)
Elle se lance en politique pour combattre Margaret Thatcher qu’elle accuse de détruire la société britannique. Entre 1992 et 2015, elle siège à la Chambre des communes comme députée travailliste de Hampstead and Highgate (district londonien de Camden). Elle consacre une attention particulière aux pauvres, aux chômeurs et aux malades. Elle est nommée sous-secrétaire d’état aux transports dans le gouvernement de Tony Blair de 1997 à 1999. Elle en devient une farouche opposante après l’invasion de l’Irak en 2003.
En avril 2013, lors des hommages parlementaires rendus à Margaret Thatcher à la suite de son décès, elle dresse la liste des dégâts matériels et moraux du thatchérisme qu’elle a pu constater dans sa circonscription : hôpitaux sans argent et sans médicaments, écoles sans moyens et sans livres pour faire cours, des milliers de sans-abris supplémentaires à la suite des fermetures d’hôpitaux psychiatriques. Elle ajoute que, pendant le mandat de Margaret Thatcher, tout ce qui était traditionnellement considéré comme un vice, comme la cupidité, l’égoïsme, le dédain pour les plus fragiles, la rapacité, était vu comme des vertus.
Elle est morte le 15 juin 2023 à 87 ans.
Je me souviens de sa présence au cinéma, de sa voix grave et de son interprétation extraordinaire dans La Casa de Bernarda Alba de Federico García Lorca, sous la direction de Núria Espert au Lyric Hammersmith en 1986 (Téléfilm de 1991. Mise en scène : Stuart Burge et Núria Espert). Elle a toujours refusé toute sophistication et recherché l’authenticité.
Julio Cortázar a écrit une nouvelle, publiée en 1980 Queremos tanto a Glenda que j’ai relue hier.
Nous l’aimons tant, Glenda. Traduction : Laure Guille-Bataillon et Françoise Campo-Timal, Gallimard, 1982 ; réédition, Gallimard, Folio n° 5728, 2014.
Résumé : Un groupe de fans de l’actrice Glenda Garson (adaptation du nom de l’actrice Glenda Jackson) commence à voler tous les films de l’actrice pour les remplacer par des versions éditées cherchant à montrer « la perfection de l’actrice ». Lorsque Glenda annonce sa retraite, le groupe est heureux de considérer que leur travail est terminé. Cependant, lorsque l’actrice change d’avis, ils décident de prendre des mesures drastiques.
« De golpe los errores, las carencias se nos volvieron insoportables ; no podíamos aceptar que Nunca se sabe por qué terminara así, o que El fuego de la nieve incluyera la infame secuencia de la partida de póker (en la que Glenda no actuaba pero que de alguna manera la manchaba como un vómito, ese gesto de Nancy Phillips y la llegada inadmisible del hijo arrepentido). »
Nous l’aimons tant, Glenda et autres récits.
« Soudain les erreurs, les faiblesses des mises en scène nous furent insupportables ; nous ne pouvions par accepter que On ne sait jamais pourquoi finisse ainsi et que Le feu de la neige comprenne l’infâme séquence de la partie de poker (où Glenda n’apparaissait pas, mais qui l’atteignait quand même comme une éclaboussure de vomi, ce geste de Nancy Philipps et l’inadmissible arrivée du fils repenti). »
Claudio Rodríguez est né à Zamora (Castilla y León) le 30 janvier 1934. C’est un des grands poètes espagnols de la seconde moitié du XX ème siècle. Il fait partie de la Génération de 1950 (Carlos Barral, Francisco Brines, José María Caballero Bonald, Jaime Gil de Biedma, José Agustín Goytisolo, Ángel González, José Ángel Valente). )
Il est étudiant à Madrid de 1951 à 1957 (Licence de Filología Románica). Il obtient à dix-neuf ans en 1953 l’important prix Adonáis pour Don de la ebriedad (Don de l’ébriété, Arfuyen, 2008. Traduction : Laurence Breysse-Chanet)
Il est lecteur d’Espagnol à l’Université de Nottingham (1958-1960), puis à l’Université de Cambridge (1960-1964).
Á son retour en Espagne, il se consacre à l’enseignement de la littérature espagnole et à la traduction (T.S.Eliot).
Il n’aime pas la vie littéraire. Il préfère la marche, la nature, la lumière, la Castille, les personnes simples. Il déteste le protocole (“Hoy hay mucho protoculo” “¿Pero qué es esa expresión horrible del cultivo de la imagen? Una persona es una persona, no una imagen”). Il ne manquait pas d’humour : «Si yo estuviera en un país comunista me expulsarían por falta de producción»
Il entre à la Real Academia Española en 1987, obtient le Prix Príncipe de Asturias en 1993 pour l’ensemble de son œuvre et la même année le Prix Reina Sofía de Poésie Ibéroaméricaine.
Il meurt à Madrid le 22 juillet 1999.
Como el son de las hojas del álamo
El dolor verdadero no hace ruido. Deja un susurro como el de las hojas del álamo mecidas por el viento, un rumor entrañable, de tan honda vibración, tan sensible al menor roce, que puede hacerse soledad, discordia, injusticia o despecho. Estoy oyendo su murmurado son que no alborota sino que da armonía, tan buido y sutil, tan timbrado de espaciosa serenidad, en medio de esta tarde, que casi es ya cordura dolorosa, pura resignación. Traición que vino de un ruin consejo de la seca boca de la envidia. Es lo mismo. Estoy oyendo lo que me obliga y me enriquece a costa de heridas que aún supuran. Dolor que oigo muy recogidamente como a fronda mecida sin buscar señas, palabras o significación. Música sola, sin enigmas, son solo que traspasa mi corazón, dolor que es mi victoria.
Alianza y condena, Revista de Occidente, 1954.
Comme le bruissement des feuilles du peuplier
La vraie douleur ne fait pas de bruit : elle laisse comme un bruissement de feuilles de peuplier agitées par le vent, une rumeur intime, d’une vibration si profonde, si sensible au moindre frôlement, qu’elle peut devenir solitude, discorde, injustice ou dépit. Je suis là à écouter ses murmures qui, loin de troubler, sont porteurs d’harmonie, si effilés et subtils, avec un tel son de spacieuse sérénité en cette fin d’après-midi, qu’ils sont presque sagesse douloureuse, résignation pure. Trahison qui est venue d’un mauvais conseil de la bouche flétrie de la jalousie. C’est égal. Je suis là à écouter ce qui me contraint et m’enrichit, au prix de blessures qui suppurent encore. Douleur que j’entends avec grand recueillement, comme le frémissement d’un feuillage sans chercher ni signes, ni mots ni sens. Musique seule, sans énigmes, murmures solitaires qui transpercent mon cœur, douleur qui est ma victoire.
Poésie espagnole. Anthologie 1945-1990. Traduction : Claude de Frayssinet. Actes Sud, 1995.
Cielo
Ahora necesito más que nunca mirar al cielo. Ya sin fe y sin nadie, tras este seco mediodía, alzo los ojos. Y es la misma verdad de antes, aunque el testigo sea distinto. Riesgos de una aventura sin leyendas ni ángeles, ni siquiera ese azul que hay en mi patria. Vale dinero respirar el aire, alzar los ojos, ver sin recompensa, aceptar una gracia que no cabe en los sentidos pero les daba nueva salud, los aligera y puebla. Vale por mi amor este don, esta hermosura que no merezco ni merece nadie. Hoy necesito el cielo más que nunca. No que me salve, sí que me acompañe.
Alianza y condena. 1965.
Un viento
Dejad que el viento me traspase el cuerpo y lo ilumine. Viento sur, salino, muy soleado y muy recién lavado de intimidad y redención, y de impaciencia. Entra, entra en mi lumbre, ábreme ese camino nunca sabido: el de la claridad. Suena con sed de espacio, viento de junio, tan intenso y libre que la respiración, que ahora es deseo me salve. Ven conocimiento mío, a través de tanta materia deslumbrada por tu honda gracia. Cuán a fondo me asaltas y me enseñas a vivir, a olvidar, tú, con tu clara música. Y cómo alzas mi vida muy silenciosamente muy de mañana y amorosamente con esa puerta luminosa y cierta que se me abre serena porque contigo no me importa nunca que algo me nuble el alma.
La Grande Librairie, une émission littéraire (sic) le 31 mai dernier sur France 5 (Présentateur : Augustin Trappenard). Faïza Guène, autrice de Kiffe Kiffe demain (Hachette littérature, 2004) éreinte La Métamorphose de Franz Kafka, tout en confondant auteur et personnage. ” En gros, c’est un mec qui se lève un matin, il a la flemme, il va pas au travail et il se transforme en cafard. ” ” J’ai envie de lui mettre un coup de baygon à la page 50. ” Philippe Besson en rajoute : « C’est un texte aussi que je supporte pas, j’ai beaucoup de mal. Je trouve ça en fait “malaisant” tout le temps c’est-à-dire, je me sens très mal avec ce type qui se débat en cafard, où y a jamais aucun espoir, je suis consterné par ça. » Médiocrité de l’époque, nullité de la télévision.
Les mains de Gabriel García Márquez (Kim Manresa)
RFI ,18/04/2014
García Márquez, el autor que revelaba los secretos del escritor
García Márquez, el escritor fallecido este 17 de abril a los 87 años de edad, revelaba sin misterios las claves de la creación literaria. El Nobel colombiano evocó algunas de ellas en esta entrevista concedida a la periodista de RFI Conchita Penilla para un documental de France 3 difundido en 1998. En la intimidad del escritor y la página en blanco ocurre un misterioso proceso de creación que Gabriel García Márquez, el novelista fallecido este jueves en su residencia de Ciudad de México a los 87 años de edad, evocaba con mucha generosidad. Éste fue el caso de una de las últimas largas entrevistas que concedió a un canal de televisión. Se trata del documental “La escritura embrujada” para el programa “Un siglo de escritores” de la cadena de televisión pública francesa France 3 difundido en marzo de 1998 y realizado por la periodista de RFI Conchita Penilla. En ese encuentro con la periodista colombiana, García Márquez rinde homenaje a los autores que ejercieron una gran influencia en su obra, en particular Franz Kafka. Pero, ¿por qué el libro de un escritor de origen judío nacido en Praga en 1883 podía inspirar a un colombiano nacido cerca al mar Caribe en 1927? García Márquez explica que cuando terminó el bachillerato “ya tenía una noción de lo que era un cuento”, pero “no los sabía escribir (…) siempre les faltaba algo”. La lectura de una novela corta de Kafka le permitió superar ese obstáculo mayor.
‘Metamorfosis’ gracias a Kafka “Cuando entré a la facultad de derecho, en Bogotá, una noche entré a la pensión de estudiantes donde vivía. Tenía un amigo que leía mucho y me pasó un librito pequeño amarillo y me dijo: ‘Léete eso’. Yo leía mucho, leía todo lo que me caía en las manos y abrí este libro y decía: ‘Una mañana, después de un sueño tormentoso, Gregorio Samsa se encontró convertido en un gigantesco insecto’”. El Nobel de literatura olvidó la reacción física de su cuerpo en ese instante, pero recuerda en cambio la sensación que experimentó: “Fue como si me hubiera caído de la cama”. Para el joven que soñaba con convertirse en escritor, leer esa frase de Kafka fue una “revelación”. Por primera vez vislumbró la existencia de una puerta que él también podría abrir. “Antes de ese momento (la lectura de La Metamorfosis), yo probablemente había pensado que eso no se podía hacer. Y esto a pesar de que me había tragado completitas Las mil y una noches. Pero aquí había algo importante, una cuestión de método para contar algo, lo que yo no tenía. Fue una verdadera resurrección”. El novelista colombiano recuerda que luego de esa lectura se levantó y escribió su primer cuento (La tercera resignación), el primero que publicó en el diario El Espectador donde trabajó durante algunos años como periodista. A partir de ahí, todas sus lecturas se orientaron hacia la novela contemporánea. La clave de la ficción es la credibilidad Si el método es fundamental, uno de los mayores descubrimientos que hizo García Márquez durante su carrera fue el papel que desempeña el destinatario final de la obra, el lector. “Un escritor puede escribir lo que le de la gana siempre que sea capaz de hacerlo creer. El problema de la ficción, el problema de la literatura, es precisamente el problema de la credibilidad”. De algún modo llegó a la conclusión de que debía convencer a los lectores de la misma manera en que su abuela lo convencía a él cuando contaba ciertas historias imposibles de creer: “Mi abuela era capaz de decir las cosas más extraordinarias y menos verosímiles pero con una ‘cara de palo’ tal que no cabía ninguna duda de que ella lo creía y que por consiguiente era verdad”. Adoptar una ‘cara de palo’, es decir, el rostro impasible y grave del que está seguro de lo que dice, sólo es posible si el propio autor está íntimamente convencido de lo que está narrando. Por eso García Márquez lanza esta advertencia a manera de consejo a quienes se dedican a la ficción: “Lo que uno no cree, no puede hacerlo creer”. Si, de acuerdo, pero ¿cómo? ¿Cuál es el camino? Porque si el principio es relativamente fácil de entender, ponerlo en práctica parece extremadamente difícil, sólo accesible a unos pocos. García Márquez no negaba esa inmensa dificultad, ese privilegio de unos pocos. Para esto también tenía un análisis muy lúcido, basado en su propia experiencia. “A veces hay el talento sin la vocación y hay la vocación sin el talento. Cuando uno nace con esas dos virtudes no hay nada que lo detenga, yo desde que nací sabía que iba a ser escritor, quería ser escritor, tenía la voluntad, la disposición, el ánimo y la aptitud para ser escritor. Siempre escribí, nunca pensé que pudiera hacer otra cosa. Estaba dispuesto a morirme de hambre pero ser escritor”.
Lisez la biographie Kafka. Tome I. Le temps des décisions de Reiner Stach (traduction de l’allemand par Régis Quatresous, Le Cherche Midi, 956 p., 29,50 €.) et les deux tomes de La Pléiade Journaux et lettres III, IV : 1897-1924.
Hier, nous avons parlé avec mon ami Patrick de ce curieux texte de Borges. Merci à Manuel et à Ivan qui me l’avaient transmis.
Le Velue.
La peluda de La Ferté Bernard
A orillas del Huisne, arroyo de apariencia tranquila, merodeaba durante la Edad Media la Peluda (La velue). Este animal habría sobrevivido el Diluvio, sin haber sido recogido en el arca. Era del tamaño de un toro; tenía cabeza de serpiente, un cuerpo esférico cubierto de un pelaje verde, armado de aguijones cuya picadura era mortal. Las patas eran anchísimas, semejantes a las de la tortuga; con la cola, en forma de serpiente, podía matar a las personas y a los animales. Cuando se encolerizaba, lanzaba llamas que destruían las cosechas. De noche, saqueaba los establos. Cuando los campesinos la perseguían, se escondía en las aguas del Huisne que hacía desbordar, inundando toda la zona. Prefería devorar los seres inocentes, las doncellas y los niños. Elegía a la doncella más virtuosa, a la que llamaban la Corderita (L’agnelle). Un día, arrebató a una Corderita y la arrastró desgarrada y ensangrentada al lecho del Huisne. El novio de la víctima cortó con una espada la cola de la Peluda, que era su único lugar vulnerable. El monstruo murió inmediatamente. Lo embalsamaron y festejaron su muerte con tambores, con pífanos y danzas.
El libro de los seres imaginarios, 1967. 1969 con Margarita Guerrero.
La Velue de La Ferté-Bernard
Aux bords de l’Huisne, rivière d’apparence tranquille, maraudait durant le Moyen Âge la Velue. Cet animal aurait survécu au Déluge, sans être recueilli dans l’Arche. Elle était de la taille d’un taureau ; elle avait une tête de serpent, un corps sphérique couvert d’un pelage vert, armé d’aiguillons dont la piqûre était mortelle. Les pattes étaient très larges, semblables à celles de la tortue ; avec la queue, en forme de serpent, elle pouvait tuer les hommes et les animaux. Quand elle se mettait en colère, elle lançait des flammes qui détruisaient les récoltes. De nuit, elle saccageait les étables. Quand les paysans la poursuivaient, elle se cachait dans les eaux de l’Huisne qu’elle faisait déborder, inondant toute la région. Elle préférait dévorer les êtres innocents, les jeunes filles et les enfants. Elle choisissait la plus vertueuse jeune fille, celle qu’on appelait l’Agnelle. Un jour, elle ravit une agnelle et elle la traîna déchirée et sanglante jusqu’au lit de l’Huisne. Le fiancé de la victime coupa avec une épée la queue de la Velue, qui était son seul endroit vulnérable. Le monstre mourut immédiatement. On l’embauma et on fêta sa mort avec des tambours, des fifres et des danses.
Le livre des êtres imaginaires. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Gonzalo Estrada, Yves Péneau et Françoise Rosset. Gallimard, L’imaginaire. 1987. Ecrit avec la collaboration de Margarita Guerrero.
L’Huisne entre la Tonnelière et Boissy-Maugis (Orne). Le Perche.
Luis Cernuda abandonne l’Espagne en guerre en février 1938. Il vit en Grande-Bretagne de 1938 à 1947. Il enseigne comme lecteur à l’Université de Glasgow de 1939 à 1943. Il n’est pas heureux dans cette ville grise, laide, industrielle. Pourtant, son séjour en Grande-Bretagne sera particulièrement fécond pour son oeuvre poétique. La littérature anglaise – Byron, Keats, Wordsworth, Browning, T.S.Eliot – exerce sur lui une grande fascination. Les thèmes religieux apparaissent dans certains poèmes du recueil Las nubes (1937-1940), publiés en 1943 : La visita de Dios, Lázaro, La adoración de los Magos, Cementerio en la ciudad). Cernuda a lu à cette époque Miguel de Unamuno. J’aime beaucoup Lázaro.
Lázaro
Era de madrugada. Después de retirada la piedra con trabajo, Porque no la materia sino el tiempo Pesaba sobre ella, Oyeron una voz tranquila Llamándome, como un amigo llama Cuando atrás queda alguno Fatigado de la jornada y cae la sombra. Hubo un silencio largo. Así lo cuentan ellos que lo vieron.
Yo no recuerdo sino el frío Extraño que brotaba Desde la tierra honda, con angustia De entresueño, y lento iba A despertar el pecho, Donde insistió con unos golpes leves, Avido de tornarse sangre tibia. En mi cuerpo dolía Un dolor vivo o un dolor soñado.
Era otra vez la vida. Cuando abrí los ojos Fue el alba pálida quien dijo La verdad. Porque aquellos Rostros ávidos, sobre mí estaban mudos, Mordiendo un sueño vago inferioir al milagro, Como rebaño hosco Que no a la voz sino a la piedra atiende, Y el sudor de sus frentes Oí caer pesado entre la hierba.
Alguien dijo palabras De nuevo nacimiento. Mas no hubo allí sangre materna Ni vientre fecundado Que crea con dolor nueva vida doliente. Sólo anchas vendas, lienzos amarillos Con olor denso, desnudaban La carne gris y fláccida como fruto pasado; No el terso cuerpo oscuro, rosa de los deseos, Sino el cuerpo de un hijo de la muerte.
El cielo rojo abría hacia lo lejos Tras de olivos y alcores; El aire estaba en calma. Mas tremblaban los cuerpos, Como las ramas cuando el viento sopla, Brotando de la noche con los brazos tendidos Para ofrecerme su propio afán estéril. La luz me remordía Y hundí la frente sobre el polvo Al sentir la pereza de la muerte.
Quise cerrar los ojos, Buscar la vasta sombra, La tiniebla primaria Que su venero esconde bajo el mundo Lavando de vergüenzas la memoria. Cuando un alma doliente en mis entrañas Gritó, por las oscuras galerías Del cuerpo, agria, desencajada, Hasta chocar contra el muro de los huesos Y levantar mareas febriles por la sangre.
Aquel que con su mano sostenía La lámpara testigo del milagro, Mató brusco la llama, Porque ya el día estaba con nosotros. Una rápida sombra sobrevino. Entonces, hondos bajo una frente, vi unos ojos Llenos de compasión, y hallé temblando un alma Donde mi alma se copiaba inmensa, Por el amor dueña del mundo.
Vi unos pies que marcaban la linde de la vida, El borde de una túnica incolora Plegada, resbalando Hasta rozar la fosa, como un ala Cuando a subir tras de la luz incita. Sentí de nuevo el sueño, la locura Y el error de estar vivo, Siendo carne doliente día a día. Pero él me había llamado Y en mí no estaba ya sino seguirle.
Por eso, puesto en pie, anduve silencioso, Aunque todo para mí fuera extraño y vano, Mientras pensaba: así debieron ellos, Muerto yo, caminar llevándome a tierra. La casa estaba lejos; Otra vez vi sus muros blancos Y el ciprés del huerto. Sobre el terrado había una estrella pálida. Dentro no hallamos lumbre En el hogar cubierto de ceniza.
Todos le rodearon en la mesa. Encontré el pan amargo, sin sabor las frutas, El agua sin frescor, los cuerpos sin deseo; La palabra hermandad sonaba falsa, Y de la imagen del amor quedaban Sólo recuerdos vagos bajo el viento. El conocía que todo estaba muerto En mí, que yo era un muerto Andando entre los muertos.
Sentado a su derecha me veía Como aquél que festejan al retorno. La mano suya descansaba cerca Y recliné la frente sobre ella Con asco de mi cuerpo y de mi alma. Así pedí en silencio, como se pide A Dios, porque su nombre, Más vasto que los templos, los mares, las estrellas, Cabe en el desconsuelo del hombre que está solo, Fuerza para llevar la vida nuevamente.
Así rogué, con lágrimas, Fuerza de soportar mi ignorancia resignado, Trabajando, no por mi vida ni mi espíritu, Mas por una verdad en aquellos ojos entrevista Ahora. La hermosura es paciencia. Sé que el lirio del campo, Tras de su humilde oscuridad en tantas noches Con larga espera bajo tierra, Del tallo verde erguido a la corola alba Irrumpe un día en gloria triunfante.
Las nubes, 1937-1940.
Ce poème a été probablement écrit à Glasgow, en février 1939. Il prend comme point de départ le récit de Saint Jean (Évangile, chapitre 11, versets 1 à 44). Il s’agit de la résurrection de Lazare, frère de Marthe et de Marie de Béthanie, et du repas qui a lieu ensuite à Béthanie, peu de temps avant l’arrestation de Jésus.
On peut aussi relire Lazare de Magdala de Christian Garcin.
Le chef-d’œuvre de Federico García Lorca, Poète à New York, reparaît dans la collection Pavillons Poche de Robert Laffont pour la modique somme de 11 euros. Cette version bilingue bénéficie d’une nouvelle traduction qui vient après celles de Pierre Darmangeat (Collection NRF Poésie/Gallimard n° 30 , 1968) et d’André Belamich (Blbliothèque de la Pléiade NRF, 1981). Les traductrices, Zoraida Carandell et Carole Fillière, sont professeures aux universités de Nanterre et de Toulouse-Jean-Jaurès. On doit les remercier car ce recueil rend accessible au plus grand nombre des poèmes extraordinaires qui ont eu plus d’influence aux États-Unis qu’en France. On remarque que le poète andalou qui a revendiqué dans ces premiers ouvrages le folklore populaire andalou et a été critiqué alors par ses “amis” Luis Buñuel et Salvador Dalí s’inscrit là dans les formes de l’avant-garde européenne (surréalisme, expressionnisme). La dernière strophe de Fábula y rueda de los tres amigos est une véritable prémonition de l’assassinat par les franquistes du poète le 18 août 1936 à Viznar (Grenade).
Fábula y rueda de los tres amigos (Federico García Lorca)
Enrique, Emilio, Lorenzo. Estaban los tres helados: Enrique por el mundo de las camas, Emilio por el mundo de los ojos y las heridas de las manos, Lorenzo por el mundo de las universidades sin tejados.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Estaban los tres quemados: Lorenzo por el mundo de las hojas y las bolas de billar, Emilio por el mundo de la sangre y los alfileres blancos, Enrique por el mundo de los muertos y los periódicos abandonados.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Estaban los tres enterrados: Lorenzo en un seno de Flora; Emilio en la yerta ginebra que se olvida en el vaso, Enrique en la hormiga, en el mar y en los ojos vacíos de los pájaros.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Fueron los tres en mis manos tres montañas chinas, tres sombras de caballo, tres paisajes de nieve y una cabaña de azucenas por los palomares donde la luna se pone plana bajo el gallo.
Uno y uno y uno. Estaban los tres momificados con las moscas del invierno, con los tinteros que orina el perro y desprecia el vilano, con la brisa que hiela el corazón de todas las madres por los blancos derribos de Júpiter donde meriendan muerte los borrachos.
Tres y dos y uno. Los vi perderse llorando y cantando por un huevo de gallina, por la noche que enseñaba su esqueleto de tabaco, por mi dolor lleno de rostros y punzantes esquirlas de luna, por mi alegría de ruedas dentadas y látigos, por mi pecho turbado por las palomas, por mi muerte desierta con un solo paseante equivocado.
Yo había matado la quinta luna y bebían agua por las fuentes los abanicos y los aplausos. Tibia leche encerrada de las recién paridas agitaba las rosas con un largo dolor blanco. Enrique, Emilio, Lorenzo. Diana es dura, pero a veces tiene los pechos nublados. Puede la piedra blanca latir en la sangre del ciervo y el ciervo puede soñar por los ojos de un caballo.
Cuando se hundieron las formas puras bajo el cri cri de las margaritas, comprendí que me habían asesinado. Recorrieron los cafés y los cementerios y las iglesias, abrieron los toneles y los armarios, destrozaron tres esqueletos para arrancar sus dientes de oro. Ya no me encontraron. ¿No me encontraron? No. No me encontraron. Pero se supo que la sexta luna huyó torrente arriba, y que el mar recordó ¡de pronto! los nombres de todos sus ahogados.
Poeta en Nueva York, 1929-1930.
Fable et ronde des trois amis
Enrique, Emilio, Lorenzo. Étaient tous trois gelés : Enrique par le monde des lits, Emilio par le monde des yeux et des mains blessées, Lorenzo par le monde des universités sans toits.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Étaient tous trois brûlés : Lorenzo par le monde des feuilles et les boules de billard, Emilio par le monde du sang et des épingles blanches, Enrique par le monde des morts et des journaux abandonnés.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Étaient tous trois enterrés. Lorenzo dans un sein de Flora, Emilio dans le gin mort qu’on oublie dans le verre, Enrique dans la fourmi, dans la mer et dans les yeux vides des oiseaux.
Lorenzo, Emilio, Enrique. Furent tous trois dans mes mains trois montagnes chinoises, trois ombres de cheval, trois paysages de neige et une cabane de lis dans les pigeonniers où la lune se fait plate sous le coq.
Un et un, et un. Ils étaient tous trois momifiés, avec les mouches de l’hiver, avec les encriers qu’ urine le chien et méprise le vilain, avec la brise qui gèle le coeur de toutes les mères, sur les blancs décombres de Jupiter où les ivrognes croquent la mort.
Trois Et deux Et un. Je les vis se perdre en larmes et en chansons, pour un œuf de poule, pour la nuit qui montrait son squelette de tabac, pour ma douleur criblée de visages et de piquantes esquilles de lune, pour ma joie de roues dentées et de fouets, pour ma poitrine troublée par les colombes, pour ma mort déserte où un seul passant s’est égaré.
Moi, j’avais tué la cinquième lune et les éventails et les hourras buvaient l’eau des fontaines. Le tiède lait enserré des jeunes accouchées agitait les roses de sa longue douleur blanche, Enrique, Emilio, Lorenzo. Diane est dure, mais parfois ses seins sont nébuleux. La pierre blanche peut palpiter dans le sang du cerf et le cerf peut rêver par les yeux d’un cheval.
Quand sombrèrent les formes pures sous le cri-cri des marguerites, je compris qu’ils m’avaient assassiné. Ils allèrent dans tous les cafés, les cimetières et les églises, Ils ouvrirent les tonneaux et les armoires, Ils détruisirent trois squelettes pour en arracher les dents en or. Ils ne me trouvèrent plus. Ils ne me trouvèrent pas ? Non. Ils ne me trouvèrent pas. Mais l’on sut que la sixième lune s’enfuit vers l’amont du torrent et que la mer se rappela, soudain ! les noms de tous ses noyés.
Poète à New York. Pavillons poche. Robert Laffont. 2023.Traduction : Carole Fillère et Zoraida Carandell. Édition bilingue. 11 euros.
L’hispaniste, d’origine irlandaise, Ian Gibson, a remporté le XXXV Prix Comillas 2023 pour son livre autobiographique Un carmen En Granada. Memorias de un hispanista dublinés. Tusquets Editores. Ce prix est remis tous les ans à des biographies ou à des mémoires.
Né le 21 avril 1939 dans une famille irlandaise, protestante et aisée, son enfance et sa jeunesse ont été marquées par le puritanisme. Il raconte avec courage et honnêteté ses souvenirs d’enfance et d’adolescence. Venu en Espagne en 1965 pour finir sa thèse de doctorat sur l’oeuvre de jeunesse de Federico García Lorca, il s’y est installé définitivement en 1978. Il publie son premier livre en 1971 La represión nacionalista de Granada en 1936 y la muerte de Federico García Lorca (Paris, Ruedo Ibérico), interdit en Espagne par le régime franquiste. Il obtient la nationalité espagnole en 1984. il vit aujourd’hui à Madrid, dans le quartier cosmopolite de Lavapiés.
Oeuvres : 1971 La represión nacionalista de Granada en 1936 y la muerte de Federico García Lorca. 1980 En busca de José Antonio. 1982 La noche que mataron a Calvo Sotelo. 1983 Paracuellos, cómo fue. 1985-87 Federico García Lorca. 1986 Queipo de Llano. Sevilla, verano de 1936. 1989 En Granada, su Granada… Guía a la Granada de Federico García Lorca. 1998 Vida, pasión y muerte de Federico García Lorca. 1998 La vida desaforada de Salvador Dalí. 1999 Lorca-Dalí, el amor que no pudo ser. 2002 Yo, Rubén Darío. Memorias póstumas de un Rey de la Poesía (roman). 2004 Cela, el hombre que quiso ganar. Dalí joven, Dalí genial. 2006 Ligero de equipaje. La vida de Antonio Machado. 2007 Cuatro poetas en guerra. 2008 El hombre que detuvo a García Lorca. Ramón Ruiz Alonso y la muerte del poeta. 2009 Caballo azul de mi locura. Lorca y el mundo gay. 2012 La berlina de Prim (roman). 2013 Luis Buñuel. La forja de un cineasta universal.
J’ai lu avec plaisir son autobiographie, en particulier les trois dernières parties ( IV : Granada y Lorca : el año milagroso 1965-1966. V : Belfast, huida a Londres…y a Europa 1966-1975. VI : Después.)
Deux extraits significatifs :
« Había confirmado mi decisión, además, la lectura de un libro del hispanista francés Claude Couffon, titulado, Á Grenade, sur les pas de García Lorca, publicado en 1962 en París. Reproducía, entre otros, un artículo sensacional del autor sobre las últimas horas del autor del Romancero gitano dado a conocer en Le Figaro Littéraire en 1951. Couffon dejaba deslizar que poseía un ejemplar de la edición original de Impresiones y paisajes, imposible de localizar en tiendas de viejo y solo reproducido parcialmente en las Obras completas de Aguilar. Yo me moría por conocer el texto completo. Encontré su dirección postal en París, le escribí y me invitó a ir a verle. Allí me presenté sin perder tiempo. Vivía con su mujer en las afueras de la capital, a orillas del Sena. Resultó simpatiquísimo, hicimos buenas migas, le encantó mi regalo de dos botellas de Bushmills -el mejor whiskey de Irlanda del Norte – y, cuando hubimos terminado de comer, me dijo que me podía llevar el libro a Belfast y sacar alí una fotocopia. Confío absolutamente en mí, no pareció dudar un segundo de mi honradez ni preocuparle lo más mínimo la posibilidad de que, aunque certificado con todas las garantías, el libro se perdiera en su regreso a casa. Su generosidad me pareció, y me sigue pareciendo, asombrosa, inaudita. Se lo devolví una semana después, le llegó sin contratiempo alguno, y desde aquel momento tuve a Couffon como uno de mis mejores amigos franceses. Confronté enseguida mi fotocopia completa de Impresiones y paisajes con la edición de Aguilar y descubrí que allí, sin avisar al lector, se habían suprimido pasajes del libro en que el joven Lorca criticaba duramente la vida monástica, tanto de hombres como de mujeres. Le parecía una cobardía. Fue para mí un hallazgo de importancia. El régimen de Franco había permitido la publicación de las «obras completas» del poeta a partir de 1954, pero con una censura aceptada por sus herederos. » (pages 217-218)
« España, para terminar, ha sido y es mi lugar en el mundo, gracias, sobre todo, a García Lorca, que me regaló mi vocación de biógrafo. Sé que es en parte romanticismo, pero este país tan complejo, tan amnésico, tan bullicioso, a veces tan hosco -como dijo Luis Cernuda-, sigue siendo para mí, como para don Quijote, un espacio abierto a la aventura, al descubrimiento, a lo inesperado. (…) Me preocupa hondamente la situación política española actual, sobre todo la mentalidad de las derechas, todavía incapaces de reconocer y asumir la criminalidad del régimen franquista. Y que, pese a proclamarse católicas, romanas y apostólicas, no quieren ayudar en la urgente tarea de recuperar los restos de las víctimas de la dictadura todavía tiradas en fosas comunes y cunetas. ¿No es esto hipocresía? ¿No es esto despreciar al prójimo? ¿Desoír a Jesús? Me quedo con la esperanza de que un día llegue, aunque yo no la vea, la gran España dialogante, reconciliada y en paz. La España mestiza, palimpsesto de culturas, capa sobre capa, la España soñada por la Institución Libre de Enseñanza y su hijuela, la Residencia des Estudiantes. La España con tanto que contribuir a Europa y al mundo. Ojalá -permítaseme recurrir al árabe- sea pronto.» (pages 324-325)
Rafael Cadenas et ses enfants, Paula et Silvio. Madrid, Bibliothèque nationale. Jeudi 20 avril 2023. (Álvaro García)
Le poète vénézuélien Rafael Cadenas, 93 ans, a reçu hier, lundi 24 avril, à Alcalá de Henares des mains du roi Felipe VI le Prix Cervantès 2022. Il s’agit de la récompense littéraire la plus prestigieuse en langue espagnole. C’est la première fois qu’un écrivain vénézuelien est primé. Après Ida Vitale, Joan Margarit, Francisco Brines et Cristina Peri Rossi, c’est le cinquième poète de suite qui reçoit ce prix. Malgré son âge, il a pu faire le voyage et c’est lui qui a commencé la lecture publique de l’ensemble de L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche qui se fait tous les ans à la même date au Cercle des Beaux-Arts de Madrid.
Madrid, Círculo de Bellas Artes (Antonio Palacios). 1921-26. Calle de Alcalá n°42.
Colección Visor de Poesía, n.° 1012. 2017. 14 euros.
Fracaso
Cuanto he tomado por victoria es sólo humo.
Fracaso, lenguaje del fondo, pista de otro espacio más exigente, difícil de entreleer es tu letra.
Cuando ponías tu marca en mi frente, jamás pensé en el mensaje que traías, más precioso que todos los triunfos. Tu llameante rostro me ha perseguido y yo no supe que era para salvarme. Por mi bien me has relegado a los rincones, me negaste fáciles éxitos, me has quitado salidas. Era a mí a quien querías defender no otorgándome brillo. De puro amor por mí has manejado el vacío que tantas noches me ha hecho hablar afiebrado a una ausente. Por protegerme cediste el paso a otros, has hecho que una mujer prefiera a alguien más resuelto, me desplazaste de oficios suicidas.
Tú siempre has venido al quite.
Sí, tu cuerpo, escupido, odioso, me ha recibido en mi más pura forma para entregarme a la nitidez del desierto. Por locura te maldije, te he maltratado, blasfemé contra ti.
Tú no existes. Has sido inventado por la delirante soberbia.
¡Cuánto te debo! Me levantaste a un nuevo rango limpiándome con una esponja áspera, lanzándome a mi verdadero campo de batalla, cediéndome las armas que el triunfo abandona. Me has conducido de la mano a la única agua que me refleja. Por ti yo no conozco la angustia de representar un papel, mantenerme a la fuerza en un escalón, trepar con esfuerzos propios, reñir por jerarquías, inflarme hasta reventar. Me has hecho humilde, silencioso y rebelde. Yo no te canto por lo que eres, sino por lo que no me has dejado ser. Por no darme otra vida. Por haberme ceñido.
Me has brindado sólo desnudez.
Cierto que me enseñaste con dureza ¡y tú mismo traías el cauterio!, pero también me diste la alegría de no temerte.
Gracias por quitarme espesor a cambio de una letra gruesa. Gracias a ti que me has privado de hinchazones. Gracias por la riqueza a que me has obligado. Gracias por construir con barro mi morada. Gracias por apartarme. Gracias.
Falsas maniobras 1966.
Échec
Tout ce que j’ai cru victoire n’est que fumée.
Échec, langue de fond, piste d’un autre espace plus exigeant, difficile de lire entre tes lignes.
Quand tu mettais ta marque sur mon front, jamais je n’aurais imaginé que tu m’apportais un message plus précieux que tous les triomphes. Ta face flamboyante m’a poursuivi et moi je n’ai pas su que c’était pour me sauver. Pour mon bien tu m’as remisé dans les coins, refusé les succès faciles, fermé les issues. C’est moi que tu voulais défendre en m’empêchant de briller. Par pur amour pour moi tu as modelé le vide qui, durant des nuits enfiévrées, m’a fait parler à une absente. Si tu as toujours donné priorité aux autres, si tu t’es arrangé pour qu’une femme me préfère un homme plus décidé, si tu m’as licencié de postes suicidaires, c’était pour me protéger.
Tu es toujours intervenu à temps.
Qui, ton corps couvert de plaies, de crachats, ton corps odieux m’a reçu dans ma plus simple forme pour me livrer à la transparence du désert. C’est folie de t’avoir maudit, maltraité, de t’avoir blasphémé.
Tu n’existes pas. Un orgueil délirant t’a inventé.
Je te dois tant ! En me nettoyant avec une éponge rêche, en me lançant sur mon vrai champ de bataille, en me donnant les armes que le triomphe dédaigne, tu m’as levé au dessus de la mêlée. Tu m’as pris par la main et conduit à la seule eau qui puisse me refléter. Grace à toi je ne connais pas l’angoisse de jouer un rôle, de m’accrocher à tout prix à un échelon, de me faire pistonner à la force du poignet, de me battre pour arriver plus haut, de me gonfler jusqu’à éclater. Tu m’as fait humble, silencieux, rebelle. Je ne te chante pas pour ce que tu es, mais pour ce que tu ne m’ as pas laissé être. Pour ne m’avoir donné que cette vie-là. Pour m’ avoir restreint.
Tu m’as seulement offert la nudité.
Tu m’as élevé à la dure, c’est vrai. Mais toi-même apportais le cautère. Et le bonheur de ne pas te craindre.
Merci de m’ enlever de l’ épaisseur en l’ échangeant contre des caractères gras. Merci à toi de m’avoir privé d’enflures. Merci pour la richesse à laquelle tu m’as contraint. Merci d’avoir construit ma demeure avec de la boue. Merci de m’écarter. Merci.
Le poète Rafael Alberti (1902-1999) et sa femme, María Teresa León (1903-1988), elle aussi écrivain, arrivent à Ibiza le dimanche 28 juin 1936 pour passer leurs vacances d’été. Ils cherchent un endroit tranquille et abordable pour se reposer et écrire. Ils devaient aller en Galice, mais un accident de train meurtrier le 24 juin sur la ligne Madrid-La Corogne, les a fait changer d’avis au dernier moment. Les deux premières semaines sont calmes. Ils ont loué une maison (Molíde Socarrat), près de Puig des Molins, où se trouve la plus grande nécropole punique du monde. Ils parcourent l’île et établissent des liens d’amitié avec de nombreux habitants. La Guerre Civile éclate le 18 juillet 1936. Les militaires réussissent à contrôler l’ensemble de l’archipel des Baléares, à l’exception de Minorque. Le commandant d’infanterie Julio Mestre se met à la tête des troupes à Ibiza le 19 juillet, déclare l’état de guerre et arrête les principaux dirigeants des partis de gauche et des syndicats. Le couple reste trois jours dans la maison, puis se cache avec une vingtaine d’autres personnes pendant vingt jours dans une grotte (Monte del Corb Marí), près de la tour de sa Sal Rossa et du Parc Natural de ses Salines.
Le 8 août 1936, deux colonnes républicaines débarquent dans l’île : l’une vient de Barcelone a à sa tête le capitaine d’aviation Alberto Bayo ; l’autre de Valence et est dirigée par le capitaine de la Garde civile Manuel Uribarri.
Rafael Alberti et María Teresa León participent au Comité des Milices Antifascistes et interviennent pour protéger le patrimoine religieux des églises face aux miliciens anarchistes qui veulent le détruire. Le 11 août 1936, les deux écrivains quittent l’ile pour Valence.
La grotte.Monolithe placée devant la grotte.
Rafael Alberti publiera un récit littéraire, tirée de cette expérience, en 1937 dans la revue de la Alianza de Intelectuales Antifascistas para la Defensa de la Cultura, El Mono Azul : Una historia de Ibiza. María Teresa León racontera ce séjour dans Memoria de la melancolía (Buenos Aires, Losada, 1970).
Un monolithe en béton de 180 kilos a été installé récemment près de la grotte. Une plaque du céramiste local Antoni Ribas Costa (Toniet) inclut un court extrait de Memoria de la melancolía de María Teresa León.
Deux poèmes Rafael Alberti, tirés Retornos de lo vivo lejano (1952), évoquent bien cette période et son influence sur l’oeuvre de ces deux écrivains : Retornos de una isla dichosa et Retornos del amor fugitivo en los montes.
Retornos de una isla dichosa
La felicidad vuelve con el nombre ligero de un presuroso y grácil joven alado: Aire. Por parasoles verdes, las sombras que retornan contestan, y el amor, por otro nombre: Isla.
Venid, días dichosos, que regresais de lejos teniendo por morada las velas de un molino; por espejo la luna, la que el sol tiró al pozo, y por bienes del alma, todo el mar apresado en pequeñas bahías. Llegad, alegres olas de mis años, risueños labios de espuma abierta de las blancas edades. Suenen mis ojos, canten con repetidas lágrimas al pastor que desnudo da a la mar sus ovejas.
Ven otra vez, doblada maravilla incansable de los viejos olivos. Me abracen nuevamente tus raíces, hundiéndome en las tumbas de muestran su soledad al cielo.
Quiero tocaros, santas, invencibles higueras, abatidas de zumos, pero no de cansancio. Dejadme en la apretada oscuridad inmóvil de vuestra fresca alcoba dormir tranquilamente.
Soñar, soñar dormido, desde allí, en las colinas donde los algarrobos dan su miel a las nieves de la flor del almendro; desde donde calladas huertas corren sus límites abriendo arcos de cal arrobados de adelfas.
Despierte, al descorrer las ramas, ya en la tarde, padeciendo el deseo de morirme en las dunas, cuando al sol no le espera más final que el antiguo de embozarse en los hombros mojados de la noche.
Isla de amor, escúchame, antes de que te vayas, antes, ya que has venido, de que escapes de nuevo: Concédeme la gracia de aclarar los perfiles del canto que a mi lengua le quede aún, poniéndole esa azul y afilada delgadez de contornos que subes cuando al alba renaces sin rubores, feliz y enteramente desnuda, de las olas.
Retornos de lo vivo lejano, 1952.
Retornos del amor fugitivo en los montes
Era como una isla de Teócrito. Era la edad de oro de las olas. Iba a alzarse Venus de la espuma. Era la edad de oro de los campos. Iba Pan nuevamente a repetir su flauta y Príapo a verterse en los jardines. Todo era entonces. Todo entonces iba.
Iba el amor a ser dichoso. Era la juventud con cinco toros dentro. Iba el ardor a arder en los racimos. Era la sangre un borbotón de llamas. Era la paz para el amor. Venía la edad de oro del amor. Ya era.
Pero en la isla aparecieron barcos y hombres armados en las playas. Venus no fue alumbrada por la espuma. El aire en la flauta de Pan se escondió, mudo. Secas, las flores sin su dios murieron y el amor, perseguido, huyó a los montes.
Allí labró su cueva , como errante hijo arrojado de una mar oscura, entre el mortal y repetido estruendo que la asustada Eco devolvía.
Agujas rotas de los parasoles pinos le urdieron al amor su lecho. Fieras retamas, mustias madreselvas, rudos hinojos y áridos tomillos lo enguirnaldaron en la ciega noche. Y aunque, lengua de fuego, el aire aullara alrededor, la tierra, oh, sí, la tierra no le fue dura, sin embargo, al sueño del fugitivo amor entre los montes.
La edad de oro del amor venía, pero en la isla aparecieron barcos…