Chavela Vargas (Catherine Gund et Daresha Kyi)

Vu hier soir avec plaisir le documentaire Chavela Vargas de Catherine Gund et Daresha Kyi au Studio Saint-André-des-Arts (Paris).

Ce cinéma indépendant  fut créé en 1971 dans le Quartier Latin par Roger Diamantis (1934-2010). Je me souviens encore du très beau film suisse La Salamandre d’Alain Tanner avec Bulle Ogier, Jean-Luc Bideau, Jacques Denis,  vu dans cette salle.

Chavela Vargas (Isabel Vargas Lizcano) est née au Costa-Rica le 19 avril 1919 et est décédée au Mexique le 5 août 2012. Abandonnée par ses parents, rejetée par la société catholique uultraconservatrice de son pays, elle s’enfuit à México de à 17 ans et devint chanteuse professionnelle. C’est une des plus grandes représentantes de la musique ranchera, mais son interprétation et sa voix rauque et mélancolique sont très particulières. Elle sera une grande amie du chanteur José Emilio Jiménez (1926-1973) qui jouera un grand rôle dans sa carrière et écrivit beaucoup pour elle.

Vêtue d’un poncho et d’un pantalon, fumant et buvant comme un homme, portant et se servant d’un pistolet, elle n’a cessé d’affirmer sa liberté face à la société mexicaine ultramachiste. Pourtant, elle ne revendiquera publiquement son homosexualité qu’à 81 ans en 2000 à la télévision colombienne.

Elle se produisit beaucoup et avec grand succès dans les cabarets de México et d’Acapulco dans les années 50, puis connut une longue eclipse de 12 ans due à son alcoolisme et ses excès.

Jesusa Rodríguez et Liliana Felipe la tirèrent de l’oubli en lui permettant de se produire dans leur cabaret El Hábito (Ciudad de México). Ensuite, Manuel Arroyo Stephens et Pedro Almodóvar lui firent connaître le succès en Espagne (Sala Caracol de Madrid) et en Europe (Olympia) en 1992.

A 93 ans, à Madrid, à la Résidencia de Estudiantes, sur une chaise roulante, elle fut encore capable de réciter des poèmes de Federico García Lorca et d’interpréter quelques-unes de ses chansons célèbres. 500 spectateurs assistèrent à son dernier concert.

Les réalisatrices de documentaires américaines Catherine Gund et Daresha Kyi montrent bien son parcours. Elles utilisent habilement des documents tournés en 1991 par la première et font appel à de nombreux témoignages de personnes qui l’ont bien connue. Ainsi, son ex-compagne, l’avocate, Alicia Elena Pérez Duarte, témoigne avec sincérité dans le film.

Cabotine et sincère, garce et innocente, elle ne guérit jamais de son enfance malheureuse.  “Chavela es cabrona, Isabel es la niña que yo soy”, dit-elle.

Ses cendres furent dispersées sur la colline que la chanteuse voyait de sa maison  de Tepoztlán, à environ 90 kilomètres au sud de Ciudad de México et une autre partie fut remise à des indiens huicholes du désert de San Luis Potosí qui l’avaient désignée “chamana mayor” alors qu’elle était encore en vie.

Bande-annonce du film Chavela Vargas. Documentaire hispano-mexicano- américain de Catherine Gund et Daresha Kyi. 2017. 1h33.

Chavela Vargas chante La Llorona dans le film Frida (2002) de Julie Taymor