Libertad

Luis Cernuda

Luis Cernuda est né le 21 septembre 1902 à Séville. Il est mort le 5 novembre 1963 à Mexico. C’est un des grands poètes espagnols de la Génération de 1927. Partisan de la République, il s’exila en Grande-Bretagne en 1938, puis aux Etats-Unis en 1947. Il s’installa définitivement au Mexique en 1952.

En 1931, alors que l’Espagne vit un bouleversement politique sans précédent et proclame la deuxième République, Luis Cernuda écrit Los placeres prohibidos (Les plaisirs interdits) , un des chefs-d’oeuvre du surréalisme et une revendication de l’amour homosexuel, inédite dans la littérature espagnole. Alternant poèmes en prose et en vers,  le poète clame un désir qui se heurte à une réalité hostile.  Il est alors amoureux d’un jeune acteur galicien, Serafín Fernández Ferro (1914-1954), que lui a présenté Federico García Lorca en mars 1931. L’acteur, autodidacte et proche de la CNT, syndicat anarcho-syndicaliste, sera lieutenant dans l’armée républicaine. Il sera blessé pendant la Guerre civile et participera au seul film tourné par André Malraux, Espoir, sierra de Teruel, tourné en 1938-39 et sorti en France en 1945 (Prix Louis Delluc). Exilé au Mexique, il mourra tuberculeux.

Serafín Fernández Ferro ( Ramón Gaya) 1932.

http://www.rtve.es/alacarta/videos/filmoteca/sierra-teruel-1938/3918025/

Luis Cernuda connaissait parfaitement déjà à cette époque l’oeuvre surréaliste d’Aragon, Breton, Crevel et Eluard.

L’amour et l’érotisme, tels sont les thèmes qui dominent ces poèmes en vers libres ou en prose. On y retrouve l’idée essentielle de la poésie de Cernuda qui est la distance qui existe entre réalité et désir.

Si el hombre pudiera decir (Luis Cernuda )

Si el hombre pudiera decir lo que ama,
Si el hombre pudiera levantar su amor por el cielo
Como una nube en la luz;
Si como muros que se derrumban,
Para saludar la verdad erguida en medio,
Pudiera derrumbar su cuerpo, dejando sólo la verdad de su amor,
La verdad de sí mismo,
Que no se llama gloria, fortuna o ambición,
Sino amor o deseo,
Yo sería aquel que imaginaba;
Aquel que con su lengua, sus ojos y sus manos
Proclama ante los hombres la verdad ignorada,
La verdad de su amor verdadero.

Libertad no conozco sino la libertad de estar preso en alguien
Cuyo nombre no puedo oír sin escalofrío;
Alguien por quien me olvido de esta existencia mezquina,
Por quien el día y la noche son para mí lo que quiera,
Y mi cuerpo y espíritu flotan en su cuerpo y espíritu
Como leños perdidos que el mar anega o levanta
Libremente, con la libertad del amor,
La única libertad que me exalta,
La única libertad por que muero.

Tú justificas mi existencia:
Si no te conozco, no he vivido;
Si muero sin conocerte, no muero, porque no he vivido.

13 de abril de 1931.

Los placeres prohibidos (1931).

Le vers 21 (“La única libertad que me exalta”)  semble une référence directe au premier Manifeste du surréalisme.

André Breton
«Chère imagination, ce que j’aime surtout en toi, c’est que tu ne pardonnes pas. Le seul mot de liberté est tout ce qui m’exalte encore. Je le crois propre à entretenir, indéfiniment, le vieux fanatisme humain. Il répond sans doute à ma seule aspiration légitime. Parmi tant de disgrâces dont nous héritons, il faut bien reconnaître que la plus grande liberté d’esprit nous est laissée. A nous de ne pas en mésuser gravement. Réduire à l’esclavage, quand bien même il y irait de ce qu’on appelle grossièrement le bonheur, c’est se dérober à tout ce qu’on trouve, au fond de soi, de justice suprême. La seule imagination me rend compte de ce qui peut être, et c’est assez pour lever un peu le terrible interdit; assez aussi pour que je m’abandonne à elle sans crainte de me tromper.»

Manifeste du surréalisme, 1924.

André Breton.

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