Luis Cernuda

Luis Cernuda (Gregorio Prieto), 1939.

Luis Cernuda, poète espagnol, républicain et homosexuel, de la Génération de 1927, est né le 21 septembre 1902 à Séville. Exilé en 1938 au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et enfin au Mexique, il est mort sans revoir son pays le 5 novembre 1963 à Mexico. Il avait 61 ans.

He venido para ver

He venido para ver semblantes
Amables como viejas escobas,
He venido para ver las sombras
Que desde lejos me sonríen.

He venido para ver los muros
En el suelo o en pie indistintamente,
He venido para ver las cosas,
Las cosas soñolientas por aquí.

He venido para ver los mares
Dormidos en cestillo italiano,
He venido para ver las puertas,
El trabajo, los tejados, las virtudes
De color amarillo ya caduco.

He venido para ver la muerte
Y su graciosa red de cazar mariposas,
He venido para esperarte
Con los brazos un tanto en el aire,
He venido no sé por qué;
Un día abrí los ojos: he venido.

Por ello quiero saludar sin insistencia
A tantas cosas más que amables:
Los amigos de color celeste,
Los días de color variable,
La libertad del color de mis ojos;

Los niñitos de seda tan clara,
Los entierros aburridos como piedras,
La seguridad, ese insecto
Que anida en los volantes de la luz.

Adiós, dulces amantes invisibles,
Siento no haber dormido en vuestros brazos.
Vine por esos besos solamente;
Guardad los labios por si vuelvo.

29 de abril de 1931. Poème publié pour la première fois dans la célèbre anthologie de Gerardo Diego: Poesía española: antología 1915-1931. Madrid, 1932.
Los placeres prohibidos, 1931. Ce recueil de Luis Cernuda ne sera publié que dans La realidad y el deseo, 1936.

Je suis venu pour voir

Je suis venu pour voir les têtes
Aimables comme un vieux balai,
Je suis venu pour voir les ombres
Qui me sourient dans le lointain.

Je suis venu pour voir les murs
Qui s’élèvent ou s’effondrent, peu importe,
Je suis venu pour voir les choses,
La rêverie des choses qui nous entourent.

Je suis venu pour voir les mers
Bercées dans leur ronde nacelle,
Je suis venu pour voir les portes,
Le travail, les toitures, les vertus
À la robe jaunie, déjà fanée.

Je suis venu pour voir la mort
Et son divertissant filet de papillons,
Je suis venu pour t’attendre,
Les bras tant soit peu écartés,
Je suis venu qui sait pourquoi;
Un jour, j’ouvris les yeux: je suis venu.

C’est pourquoi, je veux saluer sans insistance
Tant et tant de choses aimables:
Les amis de couleur bleu ciel,
Les jours aux couleurs changeantes,
La liberté aux couleurs de mes yeux;

Les garçonnets de soie si claire,
Les enterrements ennuyeux comme la pierre,
La sécurité, cet insecte
Qui niche au creux des plis de la lumière.

Adieu, mes tendres amants invisibles,
Que n’ai-je pu dormir entre vos bras.
Je ne suis venu que pour vos baisers;
Gardez vos lèvres prêtes, si jamais je reviens.

Les plaisirs interdits. Presse Sorbonne Nouvelle. 2010. Traduction: Françoise ÉTIENVRE, Serge SALAÜN, Zoraida CARANDELL, Laurie-Anne LAGET, Melissa LECOINTRE.

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